dimanche 16 décembre 2012

Dictionnaire de Théologie Catholique



Le Dictionnaire de Théologie catholique  contient 65.000 pages de texte, 9.500 articles de 460 auteurs différents. Certes face à la version papier ou au DVD de l'éditeur, il n'est présentement  pas complet, mais sera un outil utile pour le chercheur ne disposant pas du texte livré sous l'une des formes rappelées, lorsqu'il échet de signaler que le DVD ne permet pas une meilleure présentation que celle qui est ici proposée quant au corps des caractères souvent très petit, et à la présentation de la page. L'avantage réside dans la gratuité des articles accessibles.

JPB

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lundi 12 novembre 2012

Du « mariage pour tous » au droit de célébrer un authentique mariage



DISCOURS DU PAPE BENOÎT XVI
À L'OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE JUDICIAIRE
DU TRIBUNAL DE LA ROTE ROMAINE
Salle Clémentine
Samedi 22 janvier 2011

Chers membres du Tribunal de la Rote romaine!
Je suis heureux de vous rencontrer pour ce rendez-vous annuel à l’occasion de l’inauguration de l’année judiciaire. J’adresse un salut cordial au collège des prélats auditeurs, à commencer par le doyen, Mgr Antoni Stankiewicz, que je remercie de ses paroles courtoises. Je salue les officiaux, les avocats et les autres collaborateurs de ce tribunal, ainsi que toutes les personnes présentes. Ce moment m’offre l’opportunité de renouveler mon estime pour l’œuvre que vous accomplissez au service de l’Eglise et de vous encourager à un engagement toujours plus grand dans un secteur aussi délicat et important pour la pastorale et pour la salus animarum.
La relation entre le droit et la pastorale a été au centre du débat postconciliaire sur le droit canonique. La célèbre affirmation du vénérable serviteur de Dieu Jean-Paul II, selon laquelle «il est faux de croire que pour être plus pastoral le droit doive devenir moins juridique» (Allocution à la Rote romaine, 18 janvier 1990, n. 4: AAS 82 [1990], p. 874; cf. ORLF n. 7 du 13 février 1990), exprime le dépassement radical d’une opposition apparente. «La dimension juridique et pastorale — disait-il — sont unies de manière inséparable dans l’Eglise en pèlerinage sur cette terre. Il y a tout d’abord en elles une harmonie commune dérivant de leur finalité commune: le salut des âmes» (ibid.). Lors de ma première rencontre, que j’eus avec vous en 2006, j’ai cherché à souligner le sens pastoral authentique des procès de nullité de mariage, fondé sur l’amour pour la vérité (cf. Allocution à la Rote romaine, 28 janvier 2006: AAS 98 [2006], pp. 135-138). Je voudrais aujourd’hui m’arrêter pour considérer la dimension juridique qui est contenue dans l’activité pastorale de préparation et d’admission au mariage, pour chercher à mettre en lumière le lien qui existe entre cette activité et les procès judiciaires matrimoniaux.
La dimension canonique de la préparation au mariage n’est peut-être pas un élément immédiatement perceptible. En effet, d’une part, l’on observe comment, pendant les cours de préparation au mariage, les questions canoniques occupent une place peu importante, voire insignifiante, dans la mesure où l’on tend à penser que les futurs époux portent peu d’intérêt aux problématiques réservées aux spécialistes. D’autre part, bien que n’échappe à personne la nécessité des activités juridiques qui précèdent le mariage, visant à vérifier que «rien ne s’oppose à sa célébration valable et licite» (C. de D.C, can. 1066), il existe une mentalité diffuse selon laquelle l’examen des époux, les publications des bans et les autres moyens opportuns pour accomplir les enquêtes prématrimoniales nécessaires (cf. ibid., can. 1067), parmi lesquels se trouvent les cours de préparation au mariage, constitueraient des actes de nature exclusivement formelle. En effet, on considère souvent que, dans l’admission des couples au mariage, les pasteurs devraient procéder avec largesse, étant en jeu le droit naturel des personnes à se marier.
A ce propos, il est bon de réfléchir sur la dimension juridique du mariage lui-même. Il s’agit d’un thème que j’ai évoqué dans le contexte d’une réflexion sur la vérité du mariage, dans laquelle j’affirmais, entre autres: «Face à la relativisation subjectiviste et libertaire de l’expérience sexuelle, la tradition de l’Eglise affirme avec clarté le caractère naturellement juridique du mariage, c’est-à-dire son appartenance par nature au domaine de la justice dans les relations interpersonnelles. Dans cette optique, le droit est véritablement mêlé à la vie et à l’amour, comme il doit intrinsèquement l’être» (Allocution à la Rote romaine, 27 janvier 2007, AAS 99 [2007], p. 90; cf. ORLF n. 6 du 6 février 2007). Il n’existe donc pas un mariage de la vie et un autre du droit: il n’existe qu’un mariage, qui est constitutivement un lien juridique réel entre l’homme et la femme, un lien sur lequel repose l’authentique dynamique conjugale de vie et d’amour. Le mariage célébré par les époux, celui dont s’occupe la pastorale et celui examiné par la doctrine canonique, sont une seule réalité naturelle et salvifique, dont la richesse donne certainement lieu à une variété d’approches, sans cependant que vienne à manquer son identité essentielle. L’aspect juridique est intrinsèquement lié à l’essence du mariage. Cela se comprend à la lumière d’une notion non positiviste du droit, mais considérée dans l’optique de la relationalité selon la justice.
Le droit de se marier, ou ius connubii, doit être considéré dans cette perspective. Il ne s’agit donc pas d’une prétention subjective qui doit être satisfaite par les pasteurs à travers une pure reconnaissance formelle, indépendamment du contenu effectif de l’union. Le droit de contracter un mariage présuppose que l’on puisse et que l’on entende le célébrer véritablement, donc dans la vérité de son essence, telle qu’elle est enseignée par l’Eglise. Personne ne peut vanter le droit à une cérémonie nuptiale. Le ius connubii se réfère, en effet, au droit de célébrer un authentique mariage. On ne nierait donc pas le ius connubi là où il apparaîtrait évident que ne subsistent pas les prémisses pour son exercice, c’est-à-dire si manquait de façon évidente la capacité demandée pour se marier, ou bien si la volonté se fixait un objectif qui est en opposition avec la réalité naturelle du mariage.
A cet égard, je voudrais réaffirmer ce que j’ai écrit après le synode des évêques sur l’Eucharistie: «Vu la complexité du contexte culturel dans lequel vit l'Eglise dans beaucoup de pays, le synode a aussi recommandé d'avoir le plus grand soin pastoral pour la formation des fiancés et pour la vérification attentive de leurs convictions concernant les engagements prescrits pour la validité du sacrement de Mariage. Un sérieux discernement à ce sujet pourra éviter que des élans émotifs ou des raisons superficielles conduisent les deux jeunes à assumer des responsabilités qu'ils ne sauront ensuite honorer. (cf. Propositio , n. 40). Le bien que l'Eglise et la société tout entière attendent du mariage et de la famille fondée sur lui est trop grand pour qu'on ne s'engage pas totalement dans ce domaine pastoral spécifique. Mariage et famille sont des institutions qui doivent être promues et garanties de toute équivoque possible quant à leur vérité, parce que tout dommage qui leur est causé constitue de fait une blessure pour la convivialité humaine comme telle» (Exhort. ap. post-synodale Sacramentum caritatis, 22 février 2007, n. 29: AAS 99 [2007], p. 130).
La préparation au mariage, dans ses différentes phases décrites par le Pape Jean-Paul II dans l’Exhortation apostolique Familiaris consortio, possède certainement des finalités qui transcendent la dimension juridique, car son horizon est constitué par le bien intégral, humain et chrétien, des conjoints et de leurs futurs enfants (cf. n. 66: AAS 73 [1981], pp. 159-162), visant en définitive à la sainteté de leur vie (cf. C. de D.C., can. 1063, 2). Il ne faut toutefois pas oublier que l’objectif immédiat de cette préparation est celui de promouvoir la libre célébration d’un véritable mariage, c’est-à-dire la constitution d’un lien de justice et d’amour entre conjoints, avec les caractéristiques de l’unité et de l’indissolubilité, ordonné au bien des conjoints et à la procréation et l’éducation de la progéniture, et qui entre baptisés constitue l’un des sacrements de la nouvelle Alliance. Par cela, on n’adresse pas au couple un message idéologique extrinsèque, pas plus que l’on n’impose un modèle culturel; les fiancés sont en revanche mis en mesure de découvrir la vérité d’une inclination naturelle et d’une capacité de s’engager qu’ils portent inscrites dans leur être relationnel d’homme et de femme. C’est de là que naît le droit en tant que composante essentielle de la relation matrimoniale, enraciné dans un potentiel naturel des conjoints que le don consentant réalise. La raison et la foi concourent à illuminer cette vérité de vie, bien qu’il doive être clair que, comme l’a encore enseigné le vénérable Jean-Paul II, «l’Eglise ne refuse pas la célébration des noces à celui qui est bene dispositus, même si imparfaitement préparé du point de vue surnaturel, du moment qu’il a l’intention honnête de se marier selon la réalité naturelle de la conjugalité» (Allocution à la Rote romaine, 30 janvier 2003, n. 8: AAS 95 [2003], p. 397; cf. ORLF n. 6 du 11 février 2003). Dans cette perspective, un soin particulier doit être porté à l’accompagnement de la préparation au mariage, qu’elle soit éloignée, prochaine ou immédiate (cf. Jean-Paul II, Exhort. apos. Familiaris consortio, 22 novembre 1981, n. 66: AAS 73 [1981], pp. 159-162).
Parmi les moyens pour s’assurer que le projet des fiancés est réellement conjugal, se détache l’examen prématrimonial. Cet examen a un but principalement juridique: s’assurer que rien ne s’oppose à la célébration valable et licite des noces. Mais juridique ne veut pas dire formaliste, comme s’il s’agissait d’une étape bureaucratique consistant à remplir un formulaire sur la base de questions rituelles. Il s’agit, en revanche, d’une occasion pastorale unique — à valoriser avec tout le sérieux et l’attention qu’elle requiert — dans laquelle, à travers un dialogue empreint de respect et cordial, le pasteur cherche à aider la personne à se placer sérieusement face à la vérité sur elle-même et sur sa propre vocation humaine et chrétienne au mariage. Dans ce sens, le dialogue, toujours conduit séparément avec chacun des deux fiancés — sans diminuer l’importance d’autres entretiens avec le couple — exige un climat plein de sincérité, dans lequel on devrait s’appuyer sur le fait que les contractants eux-mêmes sont les premiers intéressés et les premiers obligés en conscience à célébrer un mariage valable.
De cette manière, avec les différents moyens à disposition pour une préparation et une vérification soignées, on peut développer une action pastorale efficace visant à la prévention des recours en nullités de mariage. Il faut œuvrer afin que s’interrompe, dans la mesure du possible, le cercle vicieux qui a souvent lieu entre une admission facile au mariage, sans une préparation adéquate et un examen sérieux des qualités prévues pour sa célébration, et une déclaration judiciaire parfois tout aussi facile, mais de sens inverse, où le même mariage est considéré nul uniquement sur la base de la constatation de son échec. Il est vrai que tous les motifs d’une éventuelle déclaration de nullité ne peuvent pas être identifiés ou bien se manifester au cours de la préparation au mariage, mais, de même, il ne serait pas juste de faire obstacle à l’accès aux noces sur la base de présomptions infondées, comme celle de considérer que, de nos jours, les personnes seraient généralement incapables ou n’auraient une volonté matrimoniale qu’apparente. Dans cette perspective, il apparaît important qu’il y ait une prise de conscience encore plus incisive à propos de la responsabilité dans cette matière de ceux qui ont charge d’âmes. Le droit canonique en général, et en particulier le droit matrimonial et processuel, demandent assurément une préparation particulière, mais la connaissance des aspects de base et de ceux directement pratiques du droit canonique, relatifs à leurs fonctions, constituent une exigence de formation d’importance fondamentale pour tous les agents de pastorale, en particulier pour ceux qui agissent dans la pastorale de la famille.
En outre, tout cela demande que le travail des tribunaux ecclésiastiques transmette un message univoque à propos de ce qui est essentiel dans le mariage, en harmonie avec le Magistère et la loi canonique, en parlant d’une voix unanime. En raison de la nécessité de l’unité de la jurisprudence, confiée aux soins de ce tribunal, les autres tribunaux ecclésiastiques doivent s’adapter à la jurisprudence romaine (cf. Jean-Paul II, Allocution à la Rote romaine, 17 janvier 1998, n. 4: AAS 90 [1998], p. 783). J’ai récemment insisté sur la nécessité de juger avec rectitude les causes relatives à l’incapacité du consentement (cf. Allocution à la Rote romaine, 29 janvier 2009: AAS 101 [2009], pp. 124-128). La question continue à être très actuelle, et malheureusement des positions incorrectes demeurent encore, comme celle d’identifier la discrétion de jugement demandée pour le mariage (cf. C. de D.C., can. 1095, n. 2) avec la prudence souhaitée dans la décision de se marier, en confondant ainsi une question de capacité avec une autre qui ne concerne pas la validité, car elle concerne le degré de sagesse pratique avec lequel on a pris une décision qui est, quoi qu’il en soit, vraiment matrimoniale. Le malentendu serait encore plus grand si l’on voulait attribuer une efficacité invalidante aux choix imprudents accomplis au cours de la vie matrimoniale.
Dans le domaine de la nullité en raison de l’exclusion d’un des éléments essentiels du mariage (cf. ibid., can. 1101, § 2), un sérieux engagement est également nécessaire pour que les sentences judiciaires reflètent la vérité sur le mariage, la même qui doit illuminer le moment de l’admission aux noces. Je pense, en particulier, à la question de l’exclusion du bonum coniugum. En relation à cette exclusion, semble se représenter le même danger qui menace la juste application des normes sur l’incapacité, c’est-à-dire celui de chercher des motifs de nullité dans les comportements qui ne concernent pas la constitution du lien conjugal, mais sa réalisation dans la vie. Il faut résister à la tentation de transformer les simples manquements des époux au cours de leur existence conjugale en défauts de consentement. La véritable exclusion ne peut, en effet, avoir lieu que lorsque vient à manquer ce qui est ordonné au bien des conjoints (cf. ibid, can. 1055, § 1), et qui est exclu par un acte positif de volonté. Les cas où vient à manquer la reconnaissance de l’autre comme conjoint, ou bien où l’on exclut d’ordonner la communauté de vie conjugale au bien de l’autre, sont sans aucun doute vraiment exceptionnels. L’évaluation de ces hypothèses d’exclusion du bonum coniugum devra être attentivement validée par la jurisprudence de la Rote romaine.
En concluant ces réflexions, je reprends en considération la relation entre droit et pastorale. Celle-ci est souvent l’objet de malentendus, au détriment du droit, mais aussi de la pastorale. Il faut en revanche favoriser dans tous les secteurs, et en particulier dans le domaine du mariage et de la famille, une dynamique de sens inverse, de profonde harmonie entre l’aspect pastoral et juridique, qui se révélera certainement féconde dans le service rendu à celui qui s’approche du mariage.
Chers membres du Tribunal de la Rote romaine, je vous confie tous à la puissante intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, afin que l’assistance divine ne vienne jamais à manquer dans l’accomplissement de votre travail quotidien effectué fidèlement, dans un esprit de service et fructueux, et je donne avec plaisir à tous ma Bénédiction apostolique spéciale.
 
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La guerre des cloches de Notre-Dame est déclarée



Un prêtre se bat pour empêcher qu'elles ne soient fondues et saisit la justice.

Réduites au silence après deux siècles de tintants et loyaux services, les quatre cloches de Notre-Dame de Paris, décrochées en février dernier en vue de leur remplacement, avaient provoqué une vive émotion en étant promises à la destruction. Elles sonnaient faux, le bronze du XIXe était de mauvaise qualité, elles ne méritaient même pas leur reconversion en objet d'exposition. C'est ce que l'évêché de Paris, dépositaire des cloches, qui sont propriété de l'État depuis la loi de 1905, a invoqué, soucieux d'une complète «restauration du paysage sonore» (d'un coût de 2 millions d'euros) pour le 850e anniversaire de la cathédrale en 2013.
 
Direction, donc, la fonderie Cornille Havard en Normandie où, toujours stockées, Angélique-Françoise (1915 kg), Antoinette-Charlotte (1335 kg), Hyacinthe-Jeanne (925 kg) et Denise-David (767 kg) attendent leur funeste coulée. La polémique s'en serait tenue là si elle n'avait pas pris une nouvelle volée avec l'engagement d'un recours juridique pour stopper cette destinée.
Curé contre archiprêtre
Comble du barouf, c'est une communauté religieuse qui en est l'auteur. Candidat à la reprise des cloches, l'institut religieux Sainte-Croix de Riaumont (Pas-de-Calais) s'est proposé de les récupérer pour leur offrir une deuxième vie mais aussi parce que la communauté, qui construit une abbaye dans un chantier-école avec des scouts, en a besoin. D'une pierre deux coups. «Nous étions dans un cas de vandalisme, “destruction inutile”, comme le définit le dictionnaire, et ce n'était pas acceptable, explique Alain Hocquemiller, le père prieur de Riaumont. J'étais même prêt à les payer pour les acquérir, d'autant qu'il nous en faut pour notre future église. On m'avait fait une estimation basse à 24.000 €.»
 
Par l'entremise de l'Observatoire du patrimoine religieux (OPR) qui veille à la sauvegarde des édifices et objets du culte, la communauté rencontre la Direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France (Drac), à qui incombe le devenir des cloches. Celle-ci donne son accord implicite, notifié dans un procès-verbal de réunion entre l'OPR, l'abbaye de Riaumont et la Drac, daté du 25 octobre dernier. «En conclusion, Dominique Cerclet (conservateur régional des monuments historiques à la Drac Ile-de-France, NDLR) propose de mener à bien la procédure de déclassement (du domaine public vers le privé, NDLR) et d'estimer les cloches à une valeur symbolique», résume le document. Le père prieur pense alors l'affaire entérinée. Mais voilà que la Drac conditionne la cession des cloches à «l'accord express de l'évêché» sinon «cela ne se fera pas». Or, Mgr Patrick Jacquin, recteur-archiprêtre de la cathédrale et président de l'association Notre-Dame de Paris 2013, «oppose son refus», ne décolère pas le prieur de Riaumont. Les cloches seront fondues, un point c'est tout. La Drac répond aujourd'hui aux abonnés absents, le patron de la fonderie, Paul Bergamo, n'a «pas de directive à ce jour», et l'évêché jure ses grands dieux qu'«il n'y a pas de date prévue pour la fonte», qu'il a «mis de côté cette option», qu'il n'a «pas son mot à dire sur une propriété de l'État», répond-il.
 
Le blocage du dossier et le manque d'explications provoquent «la colère mais surtout l'incompréhension», se désole Béatrice de Andia, présidente de l'OPR. «Mgr Jacquin ne voulait plus ces cloches mais il ne voulait pas non plus qu'elles sonnent ailleurs qu'à Notre-Dame, rapporte le père Alain Hocquemiller de ses échanges houleux avec l'ecclésiastique. Il n'a pas fourni d'argumentaire, juste un entêtement, les relations ont été très violentes.»
Intouchables
Un proche du dossier confie son analyse: «Pour faire passer la pilule des 2 millions d'euros, demandés aux donateurs, pour fabriquer les nouvelles cloches, l'évêché a tout intérêt à dire que les anciennes ne valent pas un clou», dit-il.
 
La querelle de cloches est consommée, la communauté prend un avocat. «Comment peut-on user et abuser d'un bien qui ne nous appartient pas, qui plus est pour le détruire?», interroge Me Philippe Bodereau. Mercredi, il adresse une mise en demeure à la fonderie pour l'enjoindre à renoncer à toute intention de fonte, Riaumont s'estimant destinataire des cloches. Et, dans la foulée, dépose une requête «aux fins de saisie-revendication». La juge en accepte les motivations en se fondant sur le document de la Drac et «autorise la saisie des biens désignés», dit l'ordonnance. Jeudi, un huissier se rend à la fonderie pour signifier la saisie.
 
Désormais, personne ne peut toucher aux cloches, en attendant les prochains arbitrages. En véritable croisé, le père Alain Hocquemiller est déterminé et prêt à décocher d'autres flèches, si besoin. Il vient de fonder l'Association de sauvegarde du patrimoine religieux et liturgique qui «se réserve le droit d'invoquer les articles 322-3-1 et 322-4 du Code pénal», prévient Me Philippe Bodereau. En effet, depuis le 15 juillet 2008, par la loi relative aux archives portant modification du code du patrimoine, la détérioration d'objets ou mobilier du culte est un délit pénal, punissable de sept années d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende…
 
SOURCE - Delphine de Mallevoüe - Le Figaro - 9 novembre 2012

samedi 29 septembre 2012

SUR LA MATIERE DE LA TABLE D'AUTEL



I
En réponse au blog RIPOSRTE CATHOLIQUE, le diocèse de Laval rétorque :
Suite à mon article du 10 juillet sur l’étrange mobilier installé dans l’église du diocèse de Laval, j’ai reçuun droit de réponse de Mme Marie-Eline Guihaire, déléguée diocésaine de la commission diocésaine d’Art sacré du diocèse de Laval :
« Nous lisons, par hasard, votre écrit cité plus bas, et tenons à vous apporter des précisions que vous auriez pu demander et obtenir avant de publier, en forme d’accusation, votre réf. au droit canon. En effet, cet autel en bois est recouvert d’une plaque de marbre ( pierre métamorphique ), collée, de couleur très proche de celle du bois. Cet autel est fixé au sol. Monseigneur Scherrer a veillé, à son arrivée à Laval, à ce que ces éléments soient respectés avant de consacrer ce nouvel autel, par ailleurs commandé avant son ordination épiscopale.
Permettez-nous de vous préciser, enfin, que cet autel n’est pas « post-moderne » mais contemporain.

D’autre part, il nous semble anormal de publier une photo sans indiquer son copyright, d’autant que vous avez récupéré ce cliché dans la revue diocésaine « Paroles et Gestes ». »
NB de Maximilien Bernard:
1. La photo vient du site internet du diocèse et non de la revue, que je ne connais pas.
2. Si je comprends bien l’article du code de droit canonique cité (« Can. 1236 – § 1. Selon la pratique traditionnelle de l’Église, la table de l’autel fixe sera en pierre et même d’une seule pierre naturelle ».), la norme est bien que les autels soient constitués d’une seule pierre. Je sais que les autels « de campagne » (tels qu’en utilisent les aumôniers scouts ou les aumôniers militaires) peuvent être de bois, avec une pierre d’autel. J’ignorais qu’il en allait de même pour les autels dans les églises et je serais reconnaissant à Mme Guihaire (ou à un lecteur de Riposte catholique) de bien vouloir me le confirmer et, le cas échéant, de m’expliquer comment une jurisprudence peut aller aussi manifestement à l’encontre de la loi elle-même.
3. La publication de cette information que je n’ai pas rendue publique moi-même, assortie d’un article du droit canon que je n’ai pas davantage inventé, ne visait pas à promulguer un jugement pour lequel, comme simple fidèle, je suis incompétent, mais simplement à poser un problème. Je constate que les précisions de Mme Guihaire ne résolvent pas le problème.
II
L'article invoqué du Code de droit canonique expose :
Can. 1236 - § 1. Selon la pratique traditionnelle de l'Église, la table de l'autel fixe sera en pierre et même d'une seule pierre naturelle; cependant, l'emploi d'un autre matériau digne et solide au jugement de la conférence des Évêques pourra aussi être admis.  Toutefois les supports ou bases peuvent être faits de n'importe quel matériau.
§ 2. L'autel mobile peut être fait de toute matière solide convenant à l'usage liturgique.
III
Le problème posé est de définir si le fait de placer sur un support intégralement en bois, une pièce de marbre couvrant la surface de l'autel à consacrer, répond au canon cité, à savoir qu'alors est considéré comme support tout ce qui n'est pas la pièce de marbre de première part, si  de seconde part, malgré la dimension de la dite pièce e marbre dans le cas présent, celle-ci ne s'apparente pas à une pierre d'autel qui s'ajoute alors à un autel fixe ou a un autel portatif, parce que la pierre d'autel  n'est pas un autel fixe.

De surcroît, l'autel fixe symbolise un tombeau, duquel J+C est sorti au matin de Pâques par Sa résurrection, d'où l'usage que tous les autels (du moins un peu anciens) étaient un mobilier "fermé" ne laissant pas passer le jour ou en voir l'intérieur. Or, cette structure en bois, ne répond pas à cette symbolique.

Est-ce le matériau, la pierre qui est le point le plus important, ou le rappel par la présence symbolique d'un tombeau de la victoire sur la mort de NSJ+C ?

JPB

mercredi 26 septembre 2012

Le pouvoir de gouvernement Canons et notions clefs



Anne Bamberg
Le pouvoir de gouvernement Canons et notions clefs




Le premier livre du code de droit canonique en vigueur pour les catholiques de rite latin traite des normes générales et plus spécialement au titre VIII portant sur le pouvoir de gouvernement, en latin potestas regiminis. Il s’agit là d’une question fondamentale dans la vie de l’Église. Comme les bases se trouvent dans le c. 129 du code de droit canonique, nous analyserons d’abord ce canon en portant l’attention sur le vocabulaire - en particulier celui de la coopération des laïcs-, en retraçant l’histoire de son élaboration et en examinant ses sources. Puis nous verrons successivement quelques notions importantes pour la compréhension du droit canonique, à savoir le for externe et le for interne, le pouvoir ordinaire et le pouvoir délégué ainsi que la notion d’Ordinaire et enfin la question de la séparation des pouvoirs.
I. Le canon 129
La première étape consiste évidemment en la lecture de ce canon fondamental en portant une attention particulière au vocabulaire. Puis nous verrons comment ce canon a été élaboré à travers divers schémas et, enfin, quelles en sont les sources indiquées dans le code annoté, à savoir l’édition du codex iuris canonici qui est fontium annotatione auctus.
1. Lecture et attention au vocabulaire
Le c. 129 est le premier du titre VIII couvrant les c. 129 à 144. On le lira tout d’abord attentivement en se reportant à l’original latin.



§ 1 Potestatis regiminis, quae quidem ex divina institutione est in Ecclesia et etiam potestas iurisdictionis vocatur, ad normam praescriptorum iuris, habilis sunt qui ordine sacro sunt insigniti. § 2 In exercitio eiusdem potestatis, christifideles laici ad normam iuris cooperari possunt.

§ 1 Au pouvoir de gouvernement qui dans l’Église est vraiment d’institution divine et est encore appelé pouvoir de juridiction, sont aptes, selon les dispositions du droit, ceux qui ont reçu l’ordre sacré. § 2 À l’exercice de ce pouvoir, les fidèles laïcs peuvent coopérer selon le droit.

Les tables de correspondance entre les canons des codes de 1983 et 1917 montrent que ce canon trouve son équivalent au c. 196 du codex iuris canonici de 1917. Il est important de lire aussi ce texte dont vous trouverez une traduction littérale et non officielle sur la colonne de droite.





Potestas iurisdictionis seu regiminis quae          Le    pouvoir    de    juridiction    ou    de
ex divina institutione est in Ecclesia, alia           gouvernement qui existe par institution
est  fori  externi,   alia   fori  interni,   seu           divine   dans   l’Église,   est   soit   de   for
conscientiae,    sive    sacramentalis    sive         externe,   soit   de   for   interne,   ou   de
extra-sacramentalis.                                        conscience,     (ce     dernier     étant)     ou
sacramentel ou extra-sacramentel.
Une question de vocabulaire doit ici être relevée. Le code de 1917 privilégiait le terme jurisdictio alors que celui de 1983 parle d’abord de potestas regiminis tout en reconnaissant que ce terme équivaut à potestas iurisdictionis. Cette option est le résultat d’une double considération. D’une part, l’expression potestas regiminis est plus conforme à Vatican II qui parle de munus regendi. Et d’autre part, dans le langage des droits étatiques actuels le terme juridiction désigne l’exercice du pouvoir judiciaire. Or pouvoir judiciaire et potestas iurisdictionis sont deux choses distinctes en droit canonique et il ne faudrait pas se laisser entraîner dans cette confusion qui constituerait une erreur majeure.
Même si nous ne traitons ici que du code latin, notons que ce canon a un parallèle au c. 979 du code des canons des Églises orientales de 1990 qui figure aussi sous le titre de potestate regiminis. Son libellé est proche de celui du c. 129 mais plus simple, omettant l’incise et etiam potestas iurisdictionis vocatur.
2. Élaboration du canon
On trouvera ci-après les schémas successifs élaborés entre les codes de 1917 et 1983. Il est important de regarder ces textes de près afin d’y relever les différences entre le c. 196 du code de 1917, les différents schémas et le c. 129 du code de 1983. C’est ainsi que l’on pourra comprendre comment le texte a évolué. Dans le schéma partiel de 1977 on trouve encore deux canons dont l’un repose sur le c. 196 du codex iuris canonici de 19171.
Schéma sur les normes générales (1977) :
Can. 96 (novus)
Potestatis regiminis in Ecclesia, ad normam praescriptorum iuris, habiles sunt, qui ordine sacro sunt insigniti ; in exercitio eiusdem potestatis, quatenus quidem eodem ordine sacro non innititur, ii qui ordine sacro non sunt insigniti eam tantum partem habere possunt quam singulis pro causis auctoritas Ecclesiae suprema ipsis concedit.



1

Si l’on veut poursuivre les recherches par l’étude des discussions à la commission de révision du code, on se reportera à la revue Communicationes, 23, 1991, p. 219-221 où se trouvent les travaux de la session du 26 novembre au 1er décembre 1979. La Relatio, qui rapporte la discussion fondamentale soulevée à propos du c. 126 du schéma de 1980, est particulièrement intéressante ; elle est publiée dans Communicationes, 14, 1982, p. 146-149.
2





Can. 97 (CIC 196)
Potestas regiminis, etiam potestas iurisdictionis vocata, quae quidem ex divina institutione est in Ecclesia, de se exercetur pro foro externo, quandoque tamen pro solo foro interno, ita quidem ut effectus quos eius exercitium natum est habere pro foro externo, in hoc foro non recognoscantur, nisi quatenus id determinatis pro casibus iure statuatur.
Schéma de 1980 :
Can. 126
Potestatis regiminis, quae quidem ex divina institutione est in Ecclesia et etiam potestas iurisdictionis vocatur, ad normam praescriptorum iuris, habiles sunt, qui ordine sacro sunt insigniti ; in exercitio eiusdem potestatis, quatenus eodem ordine sacro non innititur, christifideles laici eam partem habere possunt quam singulis pro causis auctoritas Ecclesiae suprema ipsis concedit.
Can. 127
Potestas regiminis de se exercetur pro foro externo, quandoque tamen pro solo foro interno, ita quidem ut effectus quos eius exercitium natum est habere pro foro externo, in hoc foro non recognoscantur, nisi quatenus id determinatis pro casibus iure statuatur.
Schéma de 1982 :
Can. 129
Potestatis regiminis, quae quidem ex divina institutione est in Ecclesia et etiam potestas iurisdictionis vocatur, ad normam praescriptorum iuris, habiles sunt qui ordine sacro sunt insigniti ; in exercitio eiusdem potestatis, christifideles laici tamen eam partem habere possunt, quam singulis pro causis auctoritas Ecclesiae suprema ipsis concedit.
On relèvera que selon les schémas les personnes qui n’ont pas reçu le sacrement de l’ordre peuvent cependant prendre part (partem habere possunt) au pouvoir de gouvernement. Le canon du code promulgué porte cooperari possunt, expression qui renvoie à un texte conciliaire LG 33. Ici l’expression est la suivante : laici insuper diversis modis ad cooperationem magis immediatam cum apostolatu Hierarchiae vocari possunt.
En examinant l’élaboration du c. 129 on constate que l’expression cooperari possunt, tout en se fondant sur LG 33, n’apparaît que lors de la promulgation du code. Il s’agit d’une expression importante qu’il est intéressant de préciser par l’examen, dans leur contexte, d’autres canons tout en portant l’attention sur les expressions françaises par lesquelles elle a été traduite ; on verra par exemple les c. 208, 328, 529 § 2, 652 § 4, 759, 796 § 22.
3. Les sources du c. 129
La troisième étape consiste à examiner les sources officielles. Vous trouverez ci-après la note en p. 34 du code annoté.



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Pour réfléchir à la relevance juridique de cette expression on peut encore se reporter à John M. Huels, « The Power of Governance and Its Exercise by Lay Persons: A Juridical Approach », in Studia canonica, 35, 2001, p. 59-96
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129 § 1: c. 196
129 § 2: SCConc Resol. 14 dec. 1918 (AAS 11 [1919] 128-133); Pontificia Commissio pro Russia, Ind. 20 ian. 1930; SA Resp. 19 nov. 1947; Pius pp. XII, All., 5 oct. 1957 (AAS 49 [1957] 927); LG 33; AA 24; SA Decisio, 11 iun. 1968; scris Rescr., 7 feb. 1969; scris Decr. Clericalia instituta, 27 nov. 1969 (AAS 61 [1969] 739-740), Sec. Facul., 1 oct. 1974; EN 73a; scris Rescr., 26 iun. 1978, 3; scris Resp. 21 aug. 1978; PA 7, 17
Pour le premier paragraphe du c. 129 on ne trouve que le renvoi au canon correspondant du code de 1917. Pour le § 2 les sources sont indiquées de manière chronologique, renvoyant successivement d’abord à une résolution de la Sacrée Congrégation du Concile, un indult de la Commission pontificale pour la Russie, une réponse du Tribunal suprême de la Signature apostolique, une allocution du pape Pie XII, puis après les références au Concile Vatican II, à décision de la Signature apostolique, un rescrit et un décret de la Sacrée Congrégation pour les Religieux et les Instituts séculiers, une faculté accordée par la Secrétairerie d’État, l’exhortation apostolique post-synodale de Paul VI Evangelii nuntiandi, deux réponses de la Sacrée Congrégation pour les Religieux et les Instituts séculiers et pour terminer la note directive de la Sacrée Congrégation pour le Clergé Postquam Apostoli. Pour certains textes le lieu de publication est indiqué, à savoir les Acta Apostolicae Sedis.
Ce second paragraphe repose essentiellement sur deux textes du Concile Vatican II Lumen gentium, constitution dogmatique sur l’Église, et Apostolicam Actuositatem, décret sur l’apostolat des laïcs. Si pour la bonne compréhension de ce paragraphe du canon, il est important de (re)lire LG 33 et AA 24, il est sans doute aussi bon de réfléchir à l’expression institution divine figurant au premier paragraphe. On peut alors se reporter aux premiers paragraphes de LG 18 et LG 27 et réfléchir à la légitimation et à l’exercice du pouvoir de gouvernement.
II. Notions clefs
Suite à cette étape examinons quelques notions clefs dont traite ce titre du premier livre du code de droit canonique.
1. For externe et for interne
Le c. 130 affirme que « le pouvoir de gouvernement de soi s’exerce au for externe ; cependant il s’exerce parfois au for interne seul ». Le code de 1983 lève ainsi l’équivoque que laissait subsister le c. 196 du code de 1917 qui divisait le pouvoir de juridiction en pouvoir de for externe et pouvoir de for interne, pour affirmer clairement qu’il s’agit dans les deux cas de l’exercice d’un même pouvoir dans deux cadres différents.
1° Le for externe
Le pouvoir de gouvernement s’exerce dans le cadre social et public de l’Église avec effet non seulement sur les personnes en cause, mais aussi sur l’ensemble des fidèles.
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Le c. 130 affirme d’abord que dans son exercice normal le pouvoir de gouvernement concerne le for externe ou public et ceci, tant en vertu de sa nature propre que pour des raisons de sécurité juridique.
2° Le for interne
Bien que le code de 1917, c. 190, utilise comme synonymes for interne et conscience, il ne faut pas confiner le for interne dans le strict champ de la conscience relevant de la seule morale. Là aussi il s’agit d’un domaine juridique relevant de l’exercice juridique du pouvoir de gouvernement, mais ayant d’abord en vue le salut spirituel de la personne dans le cadre, cela va de soi, de l’ordre juridique et du bien commun. La distinction for externe/for interne ne s’explique que par le caractère spécifique du droit canonique. En effet la recherche du bien commun de la communauté juridique que constitue l’Église - recherche à laquelle participe le droit canonique - ne s’épuise pas dans l’ordonnancement des relations extérieures au sein de cette communauté, mais inclut le bien spirituel d’un chacun qui, à son tour, ne se réalise que dans un rapport entre personne et communauté. Il y a là un champ ouvert à d’inévitables tensions à l’apaisement desquelles veut aider la distinction for interne/for externe, étant entendu que celles-ci ne pourront jamais être entièrement éliminées. Le for interne, à son tour, se distingue en for interne sacramentel et for interne non sacramentel.
Le for interne sacramentel
Il s’exerce exclusivement dans le cadre du sacrement de pénitence. Le c. 1079 § 3 par exemple dit : « En cas de danger de mort, le confesseur a le pouvoir de dispenser des empêchements occultes au for interne, dans l’acte même de la confession sacramentelle ou en dehors ». Au c. 1357 § 1 on lit : « Restant sauves les dispositions des c. 508 et 976, le confesseur peut remettre au for interne sacramentel la censure latae sententiae non déclarée d’excommunication ou d’interdit, s’il est dur au pénitent de demeurer dans un état de péché grave pendant le temps nécessaire pour que le supérieur compétent y pourvoie ».
Le for interne non sacramentel
Il s’exerce en dehors du sacrement de pénitence. Voir à ce sujet par exemple le c. 1079 § 3 in fine déjà cité à propos du for interne sacramentel.
Concrètement c’est surtout par sa procédure secrète que le for interne se distingue du for externe. En effet, dans le cadre du for interne sacramentel, il y a toujours lieu d’utiliser des noms d’emprunt, de détruire toute trace écrite; au for interne non sacramentel on garde les noms mais on les inscrit dans un registre conservé dans les archives secrètes de la curie (c. 1082). Les actes de gouvernement de for externe, quant à eux, sont inscrits dans les registres publics, ce qui ne dispense pas de l’élémentaire discrétion (voir par exemple le c. 220).
Si l’exercice du pouvoir de gouvernement relève de soi du for externe, on comprendra que l’efficacité des actes juridiques de for interne soit limitée comme
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cela a d’ailleurs été demandé par le synode des évêques en 1967 (voir par exemple le c. 130 in fine et le c. 74). Il y va de la sécurité juridique. Cependant le code en dispose parfois autrement. Ainsi le c. 1082 : « ... et une autre dispense n’est pas nécessaire au for externe, si par la suite l’empêchement occulte devient public ».
2. Pouvoir ordinaire et pouvoir délégué
La distinction entre pouvoir ordinaire et pouvoir délégué est fondamentale en droit canonique. Par ailleurs, l’expression ordinaire est souvent employée en droit canonique.
1° Pouvoir ordinaire
On appelle pouvoir ordinaire celui qui est attaché par le droit lui-même à un office (c. 131 § 1). Le pouvoir ordinaire peut être, selon le c. 131 § 2 :
-                soit propre, lorsqu’il est exercé par le titulaire de l’office en son nom propre
-                soit vicarial, lorsqu’il est exercé au nom d’un autre tout en étant lié à un office ; tel par exemple l’administrateur apostolique, le vicaire général, le vicaire judiciaire ou official.
2° Pouvoir délégué
On appelle pouvoir délégué celui qui est accordé à la personne elle-même sans médiation d’un office (c. 131 § 1). La délégation doit toujours être prouvée par un écrit (c. 37) ou, à défaut, par deux témoins.
3. L’Ordinaire
Le c. 134 est en soi clair, mais intentionnellement nous en reprenons toute l’énumération pour que son contenu apparaisse dans toute son importance. On distinguera d’abord ses trois expressions qu’il ne faut pas confondre :
1° Ordinaire (c. 134 § 1)
On appelle ordinaire :
-                le Pontife romain
-                les évêques diocésains
-                ceux qui ont la charge, même temporaire, d’une Église particulière, diocèse, prélature territoriale, abbaye territoriale, vicariat apostolique, préfecture apostolique, administration apostolique érigée de manière stable (c. 368)
-                vicaires généraux et épiscopaux (à savoir ceux qui jouissent du pouvoir exécutif ordinaire général)
et
-      les supérieurs majeurs des instituts religieux cléricaux de droit pontifical et des
sociétés cléricales de vie apostolique de droit pontifical qui possèdent au moins
le pouvoir exécutif ordinaire.

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2° Ordinaire du lieu (c. 134 § 2)
Ce sont les mêmes qu’au c. 134 § 1 à l’exception des supérieurs majeurs. Dans notre présentation tous ceux qui sont énumérés avant le et.
3° Évêque diocésain (c. 134 § 3)
Cette expression revient très souvent dans le code de 1983. Aussi le c. 134 § 3 est-il particulièrement important : « ce que les canons attribuent nommément à l’évêque diocésain dans le domaine du pouvoir exécutif est considéré comme appartenant uniquement à l’évêque diocésain et à ceux qui, selon le c. 381 § 2 ont un statut équiparé au sien, à l’exclusion du vicaire général et du vicaire épiscopal, à moins qu’ils n’aient de mandat spécial ». Voir par exemple le c. 961 § 2.
4° Ordinaire d’une prélature personnelle
Le c. 134 ne fait pas mention des prélatures personnelles. Mais le c. 295 § 1 parlant d’un prélat qui « est mis à sa tête comme ordinaire propre » s’entend pour tous les membres de la prélature personnelle.
Le présent document se compose en grande partie d’une reprise des pages 45-52 du livret rédigé en commun avec le Prof. Jean Schlick, Principes généraux du droit canonique, Strasbourg, [Institut de droit canonique], 1990, 73 p. Une version (ET31) en avait été publiée le 14 février 2006 dans l’ABC de droit canon, ensemble en ligne à l’Université Marc Bloch de Strasbourg (2004-2011).

dimanche 16 septembre 2012

Sur l'interprétation de la Loi de 1905 à BROU



La ville de Brou scie la croix du cimetière

I

Submitted by Vivien Hoch on 16 septembre 2012 – 17 h 13 min13 Comments |
Encore un cas de laïcité mal comprise, virulente et discriminatrice, rapporté par Mgr Aupetit sur Radio Notre-Dame. La ville de Broue fait scier une croix sur le cimetière de la commune à la demande d’une conseillère  qui avait affirmé que « le cimetière étant un bâtiment public, il ne devrait pas y avoir de signes religieux ». C’est “au nom de la tolérance” que le maire accède à cette demande…
L‘Echo républicain nous rapport les faits : Lors d’une réunion, Philippe Masson, maire (Parti radical valoisien) de la Ville a été sensibilisé par Marie Scheffer-Arth, conseillère municipale d’opposition, sur la présence d’une croix métallique placée sur le portail du nouveau cimetière. Ce dernier a été réalisé durant un mandat de Marcel Bordet, maire de l’époque. « Le cimetière étant un bâtiment public, il ne devrait pas y avoir de signes religieux » lui avait alors fait remarquer la conseillère municipale.
Prenant en compte cette remarque, Philippe Masson a écrit au service juridique de l’association des maires. Lequel lui a répondu que, selon l’article 28 de la loi de 1905 relative à la séparation de l’Église et de l’État, « il est interdit à l’avenir d’élever ou d’apposer un signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou quelque emplacement public que ce soit, à l’exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières. On déduit de cet arrêt que le maire doit veiller à ce qu’aucun bâtiment ou emplacement public ne présente de signes religieux, sauf si ces derniers ont été apposés avant 1905… Dans votre cas, il semblerait que le cimetière ait été construit après la loi de 1905. Dès lors la commune est tenue de retirer ce signe religieux. »
Les services de la Ville ont donc enlevé la croix pendant l’été. Mais l’affaire n’a pas été classée pour autant. Courant août, le maire a reçu une lettre du père Didier Henry s’élevant contre le retrait de la croix. Depuis une pétition « pour le respect des signes de la foi chrétienne et la tolérance » circule dans la ville.
II
L'article 28 évoqué et déclarant :" Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires, ainsi que des musées ou expositions." ne permet pas de déduire qu'après 1905 il échet de n'apposer aucun signe ou emblème religieux dans le cas soumis à l'avis demandé.

Bien au contraire, le cimetière est l'une des exceptions à cette interdiction, dans la mesure où la  porte du cimetière s'élève- sur le terrain de sépulture.

JPB

mardi 14 août 2012

LE CODE DE DROIT CANONIQUE N'A PAS VOCATION D'ETRE INFAILLIBLE


Selon L’Ami du Clergé, (1919, n° 45, pp. 956-958), le Code de Droit Canonique serait infaillible :

ou

http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/0/18/98/43/La-foi-est-infrangible/A-4-Infaillibiliite-du-Droit-canonique.pdf

Alors que la question de l'infaillibilité concerne l'évêque de Rome selon cette définition :
« Le Pontife romain, chef du collège des évêques, jouit, du fait même de sa charge, de cette infaillibilité quand, en tant que pasteur et docteur suprême de tous les fidèles, et chargé de confirmer ses frères dans la foi, il proclame, par un acte définitif, un point de doctrine touchant la foi et les mœurs. »  (1), la Tradition de l'Eglise indivise, montre que les canons résultent des  conciles afin de préciser, confirmer, des points touchant la Foi et les mœurs, face à des situations justifiant ces dispositions qui s'imposeront ensuite, soit de manière définitive si relevant du dogme, soit de manière que je dirai indicative si relevant de la morale et des mœurs.

Si la spécificité du Droit relatif aux rapports entre les personnes, est d'être basée sur la morale, le principe d'équité dans la théologie morale (2) engagera le professeur NAZ à consacrer douze colonnes de son Dictionnaire de droit canonique pour cet article.

Alors que l'indication de l'usage de l'équité, de l'épikie, ne se trouve pas suggérée par le Code de Droit canonique, la théologie morale incite donc à appliquer ce mode de justice qui consiste à écarter le texte de la loi pour lui substituer une autre disposition plus conforme aux exigences de la justice ou aux circonstances du cas qu'il s'agit de trancher.

Le professeur VITTRANT considère que "l'interprétation par épikie est une interprétation restrictive contraire à la lettre de la loi, mais que l'on estime équitable et conforme à la pensée du législateur, qui n'a pas pu prévoir, pense-t-on,  le cas extraordinaire où l'on se trouve." (3)

Le professeur JONE considère que "l'interprétation de l'intention du législateur (épikie) se produit quand, d'une manière raisonnable, on présume que, dans un cas précis et difficile, le législateur n'a pas voulu obliger, bien que le cas soit clairement compris dans la lettre de al loi."  (4)

Dans ces conditions, le canoniste dès lors qu'il s'agit d'une question  touchant les rapports entre les êtres, se doit d'appliquer ce principe d'équité dès lors que la question posée le permet, ce qui pour autant ne rend pas illégitime le canon ainsi interprété.

Prétendre de facto et sans réfléchir aux motifs des canons des conciles et des codes, que ces derniers donc disposent de l'infaillibilité est une erreur ou un sujet qui mériterait débat.

JPB

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 1 - Vatican I, session IV, 18 juillet 1870, Première constitution sur l'Eglise du Christ, ch. 4 : Le magistère infaillible du pontife romain.

 2 - à titre d'exemple : http://theologie-et-questions-disputeses.blogspot.fr/2009/03/epikie-et-droit-canonique-viol-et.html

 3 - Jean-Benoît VITTTRANT : Théologie morale, Paris, Beauchesne et ses fils Ed, 1942, page 40

 4 - Hérribert JONE : Précis de théologie morale catholique, Mulhouse, Salvator Ed, 1958, page 35