Le journal LA CROIX revenait ces derniers jours, dans son
édition électronique, sur les textes exposant que l’incinération était admise
par l’Eglise, depuis qu’un Décret du Saint Office en date du 8 mai 1963, avait supprimé
l’interdiction de funérailles religieuses pour ceux qui demandaient à être
incinérés.
Exposé des motifs de
l’interdiction et de la permission.
L’Eglise de Rome interdisait alors l’incinération, au motif
que cela était de nature à signifier chez le demandeur comme une atteinte à la
foi en la résurrection et la vie éternelle !
Ce raisonnement selon lequel une opposition (supposée) à la
Foi de l’Eglise, fragiliserait alors le Dogme, est pour le moins
incompréhensible.
Plus explicite se trouve être l’explication donnée par le
canon 1176 du nouveau Code de droit canonique qui énonce : « l’Église recommande vivement que soit
conservée la pieuse coutume d’ensevelir les corps des défunts ; cependant elle
n’interdit point l’incinération, à moins que celle-ci n’ait été choisie pour
des raisons contraires à la doctrine chrétienne. »
Le
motif de l’interdiction à l’incinération devient une sanction dans le cadre de
cet article, arrêter enfin une complicité à une opposition à la doctrine chrétienne.
Il
sera pris acte que si l’Eglise ne sanctionne l’incinération, que dans le cas
d’une opposition à la doctrine. Ce point
est d’une particulière importance, en ce que l’on peut déduire aisément que le
principe de l’incinération, l’Eglise l’admet donc de fait, pour quiconque ne
s’oppose pas consciemment au Dogme, en fait ne se trouve pas en rébellion avec
elle.
L’incinération
n’est pas tolérée, elle est admise, le catéchisme de l’Eglise catholique disant
donc :
«
L’Église permet l’incinération, si celle-ci ne
manifeste pas une mise en cause de la foi dans la résurrection des corps »
(n° 2301).
Quant à ce que peut
sous- entendre cette permission et cette interdiction selon la position du
défunt :
Il est heureux que la cérémonie religieuse liée aux obsèques ne soit pas un sacrement, dès lors les conséquences liturgiques de ces funérailles ne délivrent pas, comme dans un sacrement, des grâces particulières et spéciales, qui limiteraient la Grâce selon le bon vouloir de l’Officialité.
Il est heureux que la cérémonie religieuse liée aux obsèques ne soit pas un sacrement, dès lors les conséquences liturgiques de ces funérailles ne délivrent pas, comme dans un sacrement, des grâces particulières et spéciales, qui limiteraient la Grâce selon le bon vouloir de l’Officialité.
Toutefois,
deux questions méritent d’être posées :
I
-
l’absence de Foi en
la résurrection des corps et la vie éternelle chez le décédé, donne-t-il le
droit à l’Eglise de refuser des prières, fusses-elles non liées à un
Sacrement ?
II
-
L’Eglise dans son
Magistère peut-elle accepter l’incinération ?
I
Sur la sanction opérée par l’Eglise, alors qu’il ne s’agit
pas de discuter en cette partie de notre réflexion sur le bien fondé ou non de
la crémation – quel motif lui accorder ? L’Eglise est-elle juge des reins
et des cœurs ? Certes non, seul
Dieu sonde les reins et les cœurs «et toutes les Eglises sauront que je suis celui qui scrute les reins et
les cœurs” (Apoc.
II, 23). L’Eglise ne saurait se substituer ni au Père, ni au Fils, ni à l’Esprit.
Comment peut-elle d’une part juger de la pensée d’un décédé,
dès lors que sa réflexion n’est ni dans ce monde ni dans l’autre, figée.
Figer de surcroît la pensée d’un être dans le monde,
n’est-ce pas nier précisément sa vie et notamment son « activité
pensante » dans l’autre monde ? Nier aussi implicitement le devenir
eschatologique de l’être, puisque l’issue de sa vie terrestre est assimilée
alors à la fin de la Vie ?
La négation de la résurrection des corps et de la vie
éternelle en notre incarnation ne résulte pas, - à l’inverse pas plus en ce qui
concerne la croyance en ce dogme – d’un acte de pleine connaissance. De la
sorte, l’inconnaissance ou la connaissance incomplète ne saurait permettre un
jugement.
Une telle condamnation, prive le décédé des prières de
l’Eglise. Cette privation s’oppose à l’enseignement du Sauveur, qui nous demande de prier pour nos ennemis
donc aussi pour ceux qui ne partageraient pas la même Foi : “Et moi, je vous dis : Aimez vos ennemis et
priez pour ceux qui vous persécutent, » (Mat. V, 44)
Si l’Eglise refuse ses prières, si l’Eglise condamne, elle
manque à son devoir de Charité et à l’application du plus grand Commandement.
II
A Adam, à la suite de sa chute, Dieu énonce : « A la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu'à ce que tu retournes
au sol car c'est de lui que tu as été pris. Oui, tu es poussière et à la
poussière tu retourneras.” (Gen. III, 19)
Est-il permis à l’ »homme de, délibérément, modifier
les Lois de Dieu, lorsqu’il échet bien entendu de dissocier de ce choix ou de
cette permission que l’être s’accorde, les cas particuliers que sont des morts
accidentelles par le feu ?
Le corps d’Adam est modelé «avec de la poussière prise du sol” (Gen. II, 7)
Nous
sommes invités à nous souvenir “avant que
ne viennent les jours mauvais”(Eccl. XII, 1)
« que la poussière retourne à la
terre comme elle en est venue, et le souffle à Dieu qui l'a donné.” (Eccl. XII, 7)
Il
n’appartient pas à l’homme de modifier les Lois de la Création. S’il en était
besoin, Jésus+Christ vrai chef de l’Eglise évoque Son ensevelissement :(Mat.
XXVI, 12 ; Marc XIV, 8 ; Jean. XII, 7).
La mise
au tombeau est la pratique que l’on retrouve dans les Evangiles : “ Jésus trouva Lazare dans le tombeau depuis
quatre jours déjà.” (Jean XI, 17). Il ne s’agit pas d’incinérer un corps
mais de le rendre à la terre d’où il est issu.
Relativement
aux reste du Baptiste, les disciples “ vinrent
prendre son cadavre et le mirent dans un tombeau.” (Marc. VI, 29)
Alors que le corps vient de la
terre et revient à la terre, ne convient-il pas de méditer ce passage de
l’Evangile : “ Or, comme arrivait le
temps où il allait être enlevé du monde, Jésus prit résolument la route de
Jérusalem. Il envoya des messagers devant lui. Ceux-ci s'étant mis en route
entrèrent dans un village de Samaritains pour préparer sa venue. Mais on ne
l'accueillit pas, parce qu'il faisait route vers Jérusalem. Voyant cela, les
disciples Jacques et Jean dirent : " Seigneur, veux-tu que nous disions
que le feu tombe du ciel et les consume ? "Mais lui, se retournant, les
réprimanda. Et ils firent route vers un autre village.” (Luc IX, 51-57)
En ce
passage, se trouve évoquée le fait que Jésus+Christ allait être enlevé du
monde, les disciples propose au Sauveur que ceux qui Lui seraient ainsi
hostiles en refusant de L’accueillir, soient consumés par le feu. De cette
pensée, les disciples furent par le Sauveur, réprimandés !
L’Eglise
semble oublier cette réprimande faite à Jacques et Jean, réprimande qui ne
porte pas obligatoirement ou seulement sur le fait d’une idée de répression, de
vengeance si j’ose dire, mais aussi sur le moyen tel que précisé : le feu !
Dans l’apocalypse
de Jean, le feu lui est assimilé à un étang ou se trouvent précipités la Bête
et le faux prophète (Apoc. XIX, 20), le diable et leur séducteur (Apoc. XX, 10)
Ensevelissement,
mise au tombeau, tels sont les Lois de l’Evangile pour les gisants, le feu est
réservé au diable, à la Bête et au faux prophète ; ne serait-il pas judicieux
que l’Eglise de Rome réfléchisse sur le bien fondé de sa position au regard de
l’incinération
Jean-Pierre BONNEROT
Les textes de l'Église sur la crémation
Un
décret du Saint Office daté du 8 mai 1963 a supprimé l’interdiction de
funérailles religieuses pour ceux qui demandent à être incinérés.
Le canon 1176 du Code de droit canonique rappelle que « l’Église recommande vivement que soit conservée la pieuse coutume d’ensevelir les corps des défunts ; cependant elle n’interdit point l’incinération, à moins que celle-ci n’ait été choisie pour des raisons contraires à la doctrine chrétienne. » Quant au Catéchisme de l’Église catholique, il précise : « l’Église permet l’incinération, si celle-ci ne manifeste pas une mise en cause de la foi dans la résurrection des corps » (n° 2301). En France, le document de référence est la Note de Mgr Claude Feidt du 9 mars 1987, intitulée Les obsèques religieuses en cas d’incinération, reprise dans le Directoire canonique et pastoral pour les actes administratifs des sacrements (Éd. Paroi-Service 1994). Par ailleurs, la Conférence des évêques a publié en septembre 1997 un Document-Épiscopat intitulé Points de repère pour la pastorale des funérailles. |
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Can. 1176 - § 1. Les funérailles ecclésiastiques doivent être accordées aux fidèles défunts, selon le droit. § 2. Les funérailles ecclésiastiques, par lesquelles l'Église procure aux défunts le secours spirituel et honore leurs corps en même temps qu'elle apporte aux vivants le réconfort de l'espérance, doivent être célébrées selon les lois liturgiques.
§ 3. L'Église recommande vivement que soit conservée la pieuse coutume d'ensevelir les corps des défunts; cependant elle n'interdit pas l'incinération, à moins que celle-ci n'ait été choisie pour des raisons contraires à la doctrine chrétienne
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2301
L’autopsie des cadavres peut être moralement admise pour
des motifs d’enquête légale ou
de recherche scientifique. Le don gratuit d’organes
après la mort est légitime et
peut être méritoire.L’Église permet l’incinération si celle-ci ne manifeste pas une mise en cause de la foi dans la résurrection des corps (cf. ⇒ CIC, can. 1176, § 3).
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LES OBSEQUES RELIGIEUSES EN CAS
D'INCINERATION
Note de Mgr Claude Feidt, président de la Commission de
Liturgie, 9 mars
1987
La Commission épiscopale de Liturgie a été saisie, ces
derniers temps, d'un certain nombre de questions au sujet du déroulement des
funérailles religieuses en cas d'incinération : par exemple, on demande une
célébration à l'église, en présence de l'urne ou bien l'organisation d'une
prière au crématorium.
Ces questions méritent d'autant plus attention que la
pratique de l'incinération est en augmentation dans notre pays. En fait, en
1985, moins de 3 % du nombre total de morts en France ont été incinérés dans
les 16 crématoriums existants ; mais un sondage IFOP de 1979 révélait que 20 %
des Français avaient l'intention de recourir à ce procédé, qui est davantage
employé dans les nations du nord de l'Europe.
Pour comprendre quelle peut être l'attitude actuelle de
l'Eglise catholique par rapport à l'incinération, il faut en connaître
l'évolution.
Un
peu d'histoire
Pendant longtemps, pratiquement jusqu'au début du XXe
siècle, l'incinération a été comprise par l'Eglise comme susceptible de porter
atteinte à sa foi en la résurrection et la vie éternelle ; et, de fait, les
promoteurs de cette pratique ne se privaient pas d'attaquer la doctrine
chrétienne. Les funérailles religieuses étaient donc refusées " à ceux qui
avaient demandé que leur corps soit livré à la crémation " (Code de Droit
canonique de 1917, canon 1240).
Les temps ont changés, les mentalités ont évolué et les
motivations anti-religieuses ont pratiquement disparu. C'est pourquoi une
Instruction romaine, en date du 8 mai 1963, a supprimé l'interdiction de funérailles
religieuses à ceux qui avaient demandé d'être incinérés (sauf si cette demande
comprenait des motifs opposés à la foi chrétienne).
Le nouveau Rituel des funérailles, issu de la réforme
liturgique de Vatican II, a traduit cette évolution dans un texte qu'il
convient de citer : " A ceux qui ont choisi l'incinération de leur corps,
on accordera les funérailles chrétiennes, sauf s'il est évident qu'ils ont fait
ce choix pour des motifs contraires à la foi chrétienne. Tout en respectant la
liberté des personnes et des familles, on ne perdra pas de vue la préférence
traditionnelle de l'Eglise pour la manière dont le Seigneur lui-même a été
enseveli. " (Préliminaires du Rituel des funérailles, n¡18).
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