dimanche 27 mars 2011

PEUT-ON EXCOMMUNIER UN MORT ?

PEUT-ON EXCOMMUNIER UN MORT ?


« Non-seulement l'on condamna dans le V* Concile général les écrits de Théodore de Mopsueste, ainsi que ceux de Théodoret, mais l'on y condamna encore la personne même de Théodore de Mopsueste, qui avait été le maître de Nestorius, bien qu'environ cent ans se fussent déjà écoulés depuis la mort de cet Evêque. Une vive controverse s'éleva au sujet de cette condamnation, car il fut objecté, dans le Concile, que l'autorité de l'Eglise ne pouvait plus s'exercer au-delà du tombeau, surtout lorsqu'il s'agissait de quelqu'un qui était mort dans la communion catholique. » (1)

La condamnation ainsi posée provoqua une vive controverse qui justifie que l’on puisse s’interroger sur la valeur de cette dernière.
L’excommunication, puisqu’il s’agit de cette peine, doit être analysée quant à son sens, par voie de conséquence sa portée et dès lors ses éventuelles limites.
I
L’Apôtre déclare I Cor. V, 1-6: « On entend dire partout qu'il y a chez vous un cas d'inconduite, et d'inconduite telle qu'on ne la trouve même pas chez les païens : l'un de vous vit avec la femme de son père.]Et vous êtes enflés d'orgueil ! Et vous n'avez pas plutôt pris le deuil afin que l'auteur de cette action soit ôté du milieu de vous ? Pour moi, absent de corps, mais présent d'esprit, j'ai déjà jugé comme si j'étais présent celui qui a commis une telle action : au nom du Seigneur Jésus, et avec son pouvoir, lors d'une assemblée où je serai spirituellement parmi vous, qu'un tel homme soit livré à Satan pour la destruction de sa chair, afin que l'esprit soit sauvé au jour du Seigneur »

Si donc l’homme est livré à Satan pour la destruction de sa chair, le verset explique cette sentence par ces mots afin que l’esprit soit sauvé au jour du Seigneur.

L’apôtre énonce une punition relevant du domaine physique, par voie de conséquence à ce qui est transitoire, afin  et dans l’espoir que l’esprit, c'est-à-dire notre entendement, notre capacité à nous reprendre, nous conduise à revenir à une juste conduite : ainsi nous serons-nous lavés de nos erreurs au jour du Seigneur.

Cette considération selon laquelle l’excommunication est une situation transitoire, souhaitée donc comme provisoire, amena les théologiens et les canonistes à considérer cette peine comme médicinale.

La Tradition de l’Eglise est toujours restée fidèle à cette considération selon laquelle l’excommunication ne saurait être qu’une peine provisoire, médicinale quant à son but,  amener l’être à la repentance et au changement.

Le 1er concile de Lyon  tenu en 1245, en sa Constitution § 19, relativement à la sentence d’excommunication énonce : « L’excommunication visant à porter un remède et non la mort, une correction et non une destruction, aussi longtemps que celui contre lequel elle a été porté ne la méprise pas, le juge ecclésiastique qui veillera avec soin à montrer qu’en la portant il cherche à corriger et à guérir. »
Le concile de Trente (1563) en sa session 25, et au chapitre 3 de son Décret de réforme générale, rappelle : « Bien que le glaive de l’excommunication soit le nerf de la discipline ecclésiastique, fort salutaire pour maintenir les peuples dans leurs devoirs, il faut cependant y  recourir avec sobriété et grande circonspection. L’expérience,  en effet, nous renseignent que,  si l’on en frappe à la légère et pour des choses peu importantes, il est plus méprisé que redouté et  est davantage à l’origine  du mal que du bien.  {Et ajoute} : «Comme quiconque a été excommunié, et ne revient pas à résipiscence après les monitions légitimes, non seulement sera exclu des sacrements, ainsi que de la communion et de la fréquentation des fidèles, mais si, le cœur endurci,  lié par des censures il vit pendant un an dans les souillures, condamnées par celles –ci, on pourra même procéder contre lui en tant que suspect d’hérésie. »
II 
L’excommunication se trouve dans sa forme, accompagnée d’un Devoir, celui par l’Eglise, d’aider « le condamné provisoire » à corriger ses erreurs, ce n’est donc que si l’être après des monitions ne vient pas à résipiscence, qu’il se trouvera exclu des sacrements.
Le reproche d’hérésie tel que suggéré par le concile de Trente s’explique selon les bases de la théologie dogmatique, par le fait que celui qui aurait commis une faute qui s’oppose dès lors à ce que prône l’Eglise, abandonne certaines vérités qui sont partie intégrante de l’ensemble de la Révélation et du Magistère de l’Eglise. De ce fait aux yeux de l’Eglise, il devient Apostat. Dès lors que le sujet est apostat, il est en situation de schisme à l’égard de l’Eglise, Schismatique, il se sépare d’une ou plusieurs vérités de foi du contexte organique constituant le Magistère et tombe alors dans l’hérésie.
L’Eglise ne cherche pas à maintenir une partie de son troupeau dans l’hérésie, bien au contraire, elle cherchera à ramener le baptisé en son sein, d’où cette pensée selon laquelle la peine d’excommunication est une action médicinale parce qu’une telle condamnation  a pour but d’engager le fidèle à s’amender et revenir sur ses erreurs.
L’Eglise n’a en rien modifié cet espoir de résipiscence puisque le Code de 1917 expose en son canon 2340 : « § 1 Si quelqu’un par endurcissement, croupit pendant un an dans son excommunication, il est suspect d’hérésie. »
Le Code de droit canonique de 1983 expose en son canon 1312 : «§ 1. Les sanctions pénales ans l'Église sont: 1 les peines médicinales ou censures énumérées aux  canons. 1331-1333 »
Attendu que le canon 1331 évoque la situation de l’excommunié,  il s’agit bien quant à cette censure d’une mesure médicinale, médicinale parce que transitoire dans l’espoir pour l’Eglise de voir le délinquant s’amender de son erreur. Ainsi le canon 1358 du nouveau Code expose : « 1. La remise d'une censure ne peut être accordée si ce n'est au délinquant qui a mis fin à sa contumace, selon le can. 1347, § 2; mais elle ne peut être refusée à qui y a mis fin. § 2. Celui qui remet la censure peut prendre des mesures selon le canon. 1348, ou même imposer une pénitence. » Et le canon 1347 expose : « § 1. Une censure ne peut être infligée validement à moins qu'auparavant le coupable n'ait été averti au moins une fois d'avoir à mettre fin à sa contumace, et qu'un temps convenable ne lui ait été donné pour venir à résipiscence. § 2. Doit être dit avoir purgé sa contumace le coupable qui se serait vraiment repenti de son délit et qui, de plus, aurait réparé d'une façon appropriée les dommages et le scandale, ou qui, du moins, aurait promis sérieusement de le faire. »
III
Peut-on excommunier un mort ? La réponse apparaît immédiatement, cette censure étant médicinale, elle ne saurait s’appliquer qu’à des baptisés non décédés, d’autant que l’objectif de cette censure est d’amener à résipiscence celui qui est délinquant aux yeux de l’Eglise : ne pouvoir agir de la sorte et pour ce motif, constitue une violation des règles de l’Eglise par elle fixées.
Jean-Pierre BONNEROT
(1)   Mgr Vincent TIZZANI, Arch. De Nisibe, Les conciles généraux, tome 1, page 326, Rome,YPOGRAPHIE  SALY1UCCÏ, 1857

lundi 21 mars 2011

EPIKIE ET DROIT CANONIQUE : VIOL ET EXCOMMUNICATION

La presse revient largement sur l'avortement de cette brésilienne de 9 ans,
enceinte de jumeaux après avoir été violée par son beau-père. Sa mère, qui a
pris la décision de la faire avorter, ainsi que les médecins qui ont pratiqué
l'avortement, ont été excommuniés par l'archevêque de Recife et Olinda, Dom José
Cardoso Sobrinho.
Président de la Commission pontificale pour l'Amérique latine, le cardinal
Giovanni Battista Re a déclaré qu'il s'agissait "d'un cas triste, mais le vrai
problème, c'est que les jumeaux conçus étaient des personnes innocentes qui ne
pouvaient être éliminés".
Le cardinal Giovanni Battista Re, préfet de la congrégation pour les évêques au
Vatican, a justifié l'excommunication de la mère d'une Brésilienne de 9 ans
ayant avorté après avoir été violée par son beau-père, car les jumeaux qu'elle
portait "avaient le droit de vivre", apprend-on ce lundi 9 mars.
L'archevêque de Recife dans le nord-est du Brésil a excommunié jeudi la mère de
l'enfant, qui a avorté de jumeaux alors qu'elle était enceinte de quinze
semaines.
L'excommunication a été étendue à toute l'équipe médicale qui a pratiqué
l'opération, mais pas au beau-père de l'enfant car "le viol est moins grave que
l'avortement" a expliqué Giovanni Battista Re.

En cette circonstance, l'Eglise de Rome déclare appliquer les dispositions du
Code de Droit canonique.

Or l'examen de cette affaire oblige à rappeler les faits :

-l'enfant violé a 9 ans
- la maman de l'enfant et l'équipe médicale sont excommuniés
- l'auteur du viol n'st soumis à aucune peine canonique.
1° - La peine au regard du Droit canonique

Ceci étant rappelé, le canon 1223 expose : « N'est punissable d'aucune peine la
personne qui, lorsqu'elle a violé une loi ou un précepte : 1 n'avait pas encore
seize ans accomplis ; 2 ignorait, sans faute de sa part, qu'elle violait une loi
ou un précepte ; quant à l'inadvertance et l'erreur, elles sont équiparées à
l'ignorance ; 3 a agi sous la contrainte d'une violence physique ou à la suite
d'une circonstance fortuite qu'elle n'a pas pu prévoir, ou bien, si elle l'a
prévue, à laquelle elle n'a pas pu s'opposer ; 4 a agi forcée par une crainte
grave, même si elle ne l'était que relativement, ou bien poussée par la
nécessité, ou pour éviter un grave inconvénient, à moins cependant que l'acte ne
soit intrinsèquement mauvais ou qu'il ne porte préjudice aux âmes ; 5 a agi en
état de légitime défense contre un agresseur qui l'attaquait injustement,
elle-même ou une autre personne, tout en gardant la modération requise ; 6 était
privée de l'usage de la raison, restant sauves les dispositions des can. 1324, §
1, n. 2, et 1325 ; 7 a cru que se présentait une des circonstances prévues aux
nn. 4 ou 5. »

Le N° 4 de cet article peut-il justifier (en ce qu'il y aurait préjudice aux
âmes) la non application de l'une au moins des exceptions permises par l'énoncé
du canon cité ?

Ce N° 4 permet-il à l'auteur de la sanction et à ses défenseurs dans la décision
de se donner bonne conscience ?

Ce point sera discuté plus loin.

Reprenant la lecture du Code au nom duquel l'excommunication fut prononcée,
l'article 1324 expose : « § 1. L'auteur d'une violation n'est pas exempt de
peine, mais la peine prévue par la loi ou le précepte doit être tempérée, ou
encore une pénitence doit lui être substituée, si le délit a été accompli : 1
par qui n'aurait qu'un usage imparfait de la raison ; 2 par qui était privé de
l'usage de la raison par ébriété ou tout autre trouble mental analogue qui
serait coupable ; 3 par qui a agi sous le feu d'une passion violente qui
n'aurait cependant pas devancé et empêché toute délibération de l'esprit et tout
consentement de la volonté, et à condition que cette passion n'ait pas été
excitée ou nourrie volontairement ; 4 par le mineur après seize ans accomplis ;
5 par qui a agi forcé par une crainte grave, même si elle ne l'est que
relativement, ou bien poussé par le besoin ou pour éviter un grave inconvénient,
si le délit est intrinsèquement mauvais ou s'il porte préjudice aux âmes ; 6 par
qui, agissant en état de légitime défense contre un agresseur qui attaquait
injustement lui-même ou un autre, n'a pas gardé la modération requise ; 7 contre
l'auteur d'une grave et injuste provocation ; 8 par qui, par une erreur dont il
est coupable, a cru que se présentait une des circonstances dont il s'agit au
can. 1323, nn. 4 et 5 ; 9 par qui, sans faute, ignorait qu'une peine était
attachée à la loi ou au précepte ; 10 par qui a agi sans pleine imputabilité,
pourvu que celle-ci demeure grave.
§ 2. Le juge peut faire de même s'il existe quelque autre circonstance atténuant
la gravité du délit.
§ 3. Dans les circonstances dont il s'agit au § 1, le coupable n'est pas frappé
par une peine latae sententiae. »
Vu les dispositions de l'article 1324 en son N° 8, renvoyant à l'article
précédent en son N° 4,
Vu les dispositions de l'article 1324 en son N° 5, renvoyant implicitement à
l'article précédent en son N° 4,

Il ne convenait pas de procéder à la peine la plus grave puisque la peine (à
supposer qu'elle soit admise) doit être modérée, selon les dispositions de
l'article 1324 § 1.

2° - La peine au regard du principe d'Epikie.

Je reprends la claire et simple définition donnée par K. RAHNER et H. VORGRIMLER
en leur « Petit dictionnaire de théologie catholique » : « On désigne ainsi un
principe de théologie morale dans l'interprétation et l'application des lois
humaines. D'après ce principe, une telle loi (fut-elle ecclésiastique) n'oblige
pas quand la saine raison fait supposer qu'ici, dans le cas concret, dans les
circonstances données, le législateur n'aurait pas voulu obliger, comme par
exemple dans le cas où l'observation de la loi donnerait lieu, dans telle
conjecture, à des difficultés disproportionnées par rapport au but de la loi. »

Dans la situation présente, les évêques qui prirent la décision critiquée ou s'y
associèrent, soumirent-ils leur réflexion au principe d'équité ou Epikie ?
Gardiens de la Foi et de la Liturgie, ils sont aussi les administrateurs des
lois internes de l'Eglise.

Jean-Pierre BONNEROT

La sentence d’excommunication de TOLSTOÏ ne serait-elle pas invalide ?

La sentence d’excommunication de TOLSTOÏ ne serait-elle pas invalide ?



Le Patriarcat de Moscou a refusé de lever l’excommunication prononcée à l’encontre de TOSTOÏ.

Ce choix est une chose. Une autre chose est de savoir si préalablement ladite excommunication était valide et licite.



Avant d’examiner les canons byzantins qui seuls peuvent permettre de justicier ou invalider la sentence rendue, il échet de rappeler les termes du 3° canon du 1er concile de NICEE, tenu en 325 qui expose : « Il faut cependant s'assurer que l'évêque n'a pas porté cette sentence d'excommunication par étroitesse d'esprit, par esprit de contradiction ou par quelque sentiment de haine. Afin qu'un tel examen puisse avoir lieu, il a paru bon d'ordonner que dans chaque province on tint deux fois par an un synode, afin que tous les évêques de la province étant réunis, on fasse toutes les enquêtes nécessaires »

TOLSTOÏ répond-il à l’une au moins des conditions permettant son excommunication ?

I
L’excommunication est encourue dans les situations suivantes
1° Le  94° canon. du    concile IN TRULLO, tenu en 691, expose : « Ceux qui font des serments païens, le canon leur impose des peines et nous aussi, nous leur imposons l'excommunication. »
2° Le 1° canon du 7° concile NICEE II, tenu en 787, expose : « nous confirmons dans son entier et sans changement le contenu de leurs ordonnances, tel qu'il fut exposé par les saintes trompettes de l'esprit, les tout glorieux apôtres, les six saints conciles œcuméniques, les conciles particuliers rassemblés en vue d'édicter de telles ordonnances et nos saints pères; car tous sans exception, illuminés par le même esprit, ont décidé ce qui est à notre avantage. Ceux qu'ils ont condamnés à l'anathème, nous les anathématisons; ceux qu'ils ont condamnés à la déposition, nous les déposons; ceux qu'ils ont condamnés à l'excommunication, nous les excommunions »
3° Du même concile, le 4° canon relatif à l'évêque qui doit s'abstenir de tout commerce, le concernant, expose : « Si donc quelqu'un, [évêque ?] exigeant de l'or ou quelque autre  espèce ou bien pour satisfaire sa passion, se trouve avoir prononcé la suspense ou l'excommunication contre un clerc dépendant de lui, ou jeté l'interdit contre une Église, de manière à ce qu'aucun service divin ne s'y fasse, déversant ainsi sa folie contre des choses privées de sens, un tel est lui-même privé de sens et subira la loi du talion et sa peine retombera sur sa tête »

4° Le  73°canon attaché aux canons des SAINTS APOTRES (3° siècle), relativement à celui qui s'approprie un linge ou un vase sacré, expose : « Un vase sacré en argent ou une nappe consacrée, que personne ne se les approprie à son usage, car c'est illicite. Si quelqu'un est convaincu de l'avoir fait, qu'il soit soumis à la peine canonique de l'excommunication »
5° Du même, le 76° canon relatif aux  évêques qui donnent leur évêché à un parent, expose :« Qu'il ne faut pas que l'évêque faisant don de sa charge d'évêque à son frère, son Fils ou à quelque parent, ordonne ceux qu'il veut ; car il n'est pas juste de constituer des héritiers de l'épiscopat, en faisant cadeau des choses de dieu par affection humaine ; on ne doit pas mettre l'Église du Christ parmi les choses à léguer par héritage. Si quelqu'un fait cela, l'ordination sera nulle et non-avenue, et lui-même sera puni d'excommunication »
6° Le 29° canon du concile de CARTHAGE, tenu 419, prévoit que l’excommunié doit pouvoir être entendu puisqu’il énonce : « De même, il fut décidé par tout le synode, que l'évêque ou n'importe quel clerc qui fut excommunié pour sa négligence, s'il ose communier dans le temps de son excommunication avant d'être entendu en procès, sera considéré comme ayant prononcé lui-même contre soi la sentence de condamnation. »
7° Le dossier d’Apiarius, examiné lors de ce concile,  soulève qu’en cas d’excommunication i lest possible d’en appeler à l’évêque de Rome. [Il sera fait observation que depuis la séparation de 1053 c’est le Patriarche de Constantinople qui reçoit les appels dans le cadre des Eglises orthodoxes, et déjà le concile de CALCEDOINE prévoyait ce recours près de Constantinople]
8° Le 10° canon du synode PRIME-SECOND, tenu en 861, relativement à ceux qui emploient les choses sacrées pour leur usage personnel, expose : « ceux qui emploient à un usage profane pour eux ou pour d'autres les vases ou les parements destinés au service extérieur du sanctuaire, tombent sous l'excommunication »
St Basile, évêque de Césarée (+ 378)  déclare en sa première lettre sur les canons, face à ceux qui contractent trop de mariages : « Nous avons coutume d’imposer aux trigames cinq ans d’excommunication, sans avoir reçu pour cela une règle écrite, mais suivant la pratique de nos prédécesseurs »
10° St Grégoire  évêque de Nysse (+ 395) relativement à ce qu’il déclare sur le péché volontaire ou involontaire, concernant les meurtriers, expose : « ainsi dans la totale excommunication le meurtrier passera neuf ans exclu de l'église. »
Voici les dix situations prévues par les canons byzantins.

TOLSTOÏ se trouve-t-il dépendre de  l’un des motifs  prévoyant  une excommunication ?

II

Outre l’absence de faute conduisant à l’excommunication, à supposer que l’une d’elles au moins exista, préalablement à toute sentence, le Synode présentement critiqué a-t-il, selon les dispositions du 3° canon  du concile de NICEE I fait preuve en condamnant TOLSTOÏ : « d’étroitesse d'esprit, par esprit de contradiction ou par quelque sentiment de haine » ?
Le terme « haine » est fort, certes,  l’étroitesse d’esprit lui, ne saurait être invalidée, dans la mesure où en tous les cas les reproches faits à TOSTOÏ sur la façon d’exprimer sa Foi, ne relèvent pas des canons.

De surcroît, et à supposer que TOLSTOÏ succombe aux critères canoniques autorisant son excommunication (ce qui n’apparaît pas), force est demander à l’Histoire :

1° Si conformément au 29° canon du concile de CARTHAGE ; TOLSTOÏ bénéficia-t-il d’un procès et fut-il en mesure d’être à même d’être entendu ?

2° Si conformément à la Tradition rappelée notamment lors de ce même concile, la peine étant prononcée, TOSTOÎ fut-il prévenu de ce qu’il pouvait en appeler au Patriarche de Constantinople ?

Pour rappel, nul n’ignore le cas récent qui opposa en 2006, le Patriarcat de Moscou et le Patriarcat de Constantinople lieu d’appel pour toute les Eglises orthodoxes, dans l’affaire touchant le passage de Mgr Basile alors évêque dans la juridiction du Patriarcat de Moscou au Patriarcat de Constantinople, se fondant sur les canons 9, 17 et 28 du 4° concile celui de CALCEDOINE.

A supposer donc que la peine administrée soit justifiée, force est de constater que si les moyens rappelés attachés au principe du « contradictoire » et de l’appel ne durent pas permis, la sentence devient abusive et s’invalide.

III
Les reproches faits à TOLSTOÏ ne relèvent pas des conditions autorisant une excommunication.

 Il est de fait que si TOSTOÏ s’est opposé aux princes temporels de son Eglise, il n’était pas le seul dans cette situation, mail il fut dans les faits, le seul à être condamné, lorsque la peine dont il fut frappé s’avère injustifiée

.En s’opposant aux Princes de son Eglise, TOSTOÏ se prive d’une communion temporelle, or le fait de se couper volontairement du temporel, ne saurait exclure l’être de la communion spirituelle avec l’Eglise, qui dans l’orthodoxie, est bâtie non pas sur Pierre, sur un représentant ou un successeur des apôtres, mais sur  la foi de Pierre proclamée par l’apôtre selon que Le lui révèle Le Père (Matt. XVI, 17), ainsi qu’aime à le rappeler la théologie byzantine à la suite d’ORIGENE, il s’agit d’une réponse de Jésus+Christ à la confession de Pierre, « si nous disons aussi : Tu es le Christ le Fils du Dieu vivant, alors nous devenons aussi Pierre » (Hom. Sur Matt. XII, 10)

Refuser la communion temporelle pour le fidèle d’une Eglise, n’engage pas, par cet acte, la dite Eglise à retirer ou refuser audit fidèle l’accès aux sacrements et notamment à la Sainte Communion.

Refuser à un fidèle l’accès aux Sacrements, revient pour une Eglise à manquer à son Devoir de Charité qui doit présider à toutes ses actions, lorsque de surcroît il ne lui appartient pas de dire et juger à qui revient la Grâce Sacramentelle, elle ne peut se substituer à Dieu et moins encore s’opposer à l’Amour de Dieu qui veut que tous les hommes soient sauvés (I Tim. II, 4).

Si , en tout état de cause, et selon les dispositions des Canons Byzantins qui ne peuvent qu’être source à la décision choisie par l’Eglise Russe contre TOLSTOÏ, l’excommunié le fut sans raison valide et licite, de première part l’Eglise de Russie n’appliquait pas le sage rappel des Pères de Nicée qui en le canon 3 «énonce notamment :  « Il faut cependant s'assurer que l'évêque n'a pas porté cette sentence d'excommunication par étroitesse d'esprit, par esprit de contradiction ou par quelque sentiment de haine. », de seconde part, alors qu’il lui fut  demandé de lever ladite excommunication, aujourd’hui non seulement cette Eglise ne répare pas son erreur, mais maintient sa défaillance dans son Devoir de Charité.

Jean-Pierre BONNEROT