Depuis maintenant plusieurs
mois, le Père Pascal VESIN est soumis à l'interdiction d'administrer les
sacrements de l'Eglise et de communier aux Saint Mystères, au motif de son
appartenance à la Franc-Maçonnerie.
Il sera fait grief à l'Eglise
Romaine d'avoir délibérément et contre les règles les plus élémentaires du
Droit, prononcé une telle sentence.
Pour l'examen d'une demande
tendant à une décision de justice, fut-elle d'ordre ecclésial, il revient, à
qui est soumis le litige, de s'assurer
de l a
capacité de juger ce celui qui statuera,
sous peine de voir la décision invalidée par le régime des nullités.
Avant d'en venir aux conditions
et raisons dans les quelles la décision fut rendue, il n'est pas sans intérêt
de rappeler déjà ce que précisait
l'ancien Code de Droit canonique
dit de 1917 en son article 1892 :
" La sentence est affectée d'un vice
de nullité irréparable lorsque:
n1) Elle a été portée par un juge incompétent d'une manière absolue, ou par un tribunal collégial comprenant un nombre irrégulier de juges au regard du Can. 1576 p.1 ;
n2) Elle a été portée entre des parties dont l'une n'a pas qualité pour ester en justice
n3) Quelqu'un a agi au nom d'un tiers sans avoir un mandat régulier"
n1) Elle a été portée par un juge incompétent d'une manière absolue, ou par un tribunal collégial comprenant un nombre irrégulier de juges au regard du Can. 1576 p.1 ;
n2) Elle a été portée entre des parties dont l'une n'a pas qualité pour ester en justice
n3) Quelqu'un a agi au nom d'un tiers sans avoir un mandat régulier"
Le Code de Droit canonique dit de 1983 expose en son article
1620 :
"Une sentence est entachée d'un vice irrémédiable
de nullité si: 1 elle a été rendue par un juge dont l'incompétence est
absolue; 2 elle a été rendue par une personne dépourvue de pouvoir
de juger dans le tribunal qui a tranché la cause; 3 le juge a rendu sa
sentence sous l'effet de la violence ou de la crainte grave; 4 le procès
s'est fait sans la demande judiciaire dont il s'agit au can. 1501, ou encore n'a pas eu lieu contre
un quelconque défendeur; 5 elle a été rendue entre des parties dont l'une
au moins n'avait pas qualité pour ester en justice; 6 quelqu'un a agi au
nom d'une autre personne sans mandat légitime; 7 le droit de se défendre
a été dénié à l'une ou l'autre des parties; 8 le litige n'a pas été au
moins partiellement dirimé."
Avant d'aller plus outre, il
sera fait observation que l'Eglise considère qu'une nullité absolue
(irrémédiable) ne peut être couverte ou
régularisée dès lors que celui qui prenait la décision, se trouvait incompétent,
dépourvu du pouvoir de juger à savoir rendre une sentence.
I Rappel des faits et procédure
Le Père Pascal VESIN fut
démis de ses fonctions selon la décision prise par la Congrégation pour la
Doctrine de la Foi (CDF) selon la requête exposée par l'évêque d'Annecy sans que la date ne soit livrée, mais durant la
vacance su Siège Apostolique. Le diocèse d'Annecy écrit : "En mars dernier, intervenait la décision de la Congrégation pour
la Doctrine de la Foi." (mars 3013) (1)
Le reproche fait à ce prêtre,
trouve son origine dans la plainte courageusement anonyme formée, selon
laquelle cet ecclésiastique se trouve être et prêtre et franc-maçon.
Revenons à la période à
laquelle fut prise cette décision critiquée : la vacance du Siège Apostolique
commença le 28 févier 2013 à 20 heures et ne s'achèvera qu'avec l'élection d'un
nouveau Pape de Rome, élection de
François I, qui interviendra le 13 mars
2013. Le 16 mars, le pape François confirme provisoirement les chefs et
les membres des Dicastères (2).
Il sera rappelé que selon les dispositions de la Constitution apostolique Universi Dominici gregis sur la
vacance du Siège apostolique et l’élection du Pontife Romain, le chapitre III expose au § 14 : "Selon l’article 6 de la Constitution apostolique Pastor bonus13, à la mort du Pontife,
tous les Chefs des Dicastères de la Curie romaine, c’est-à-dire le cardinal
Secrétaire d’État, les cardinaux Préfets, les archevêques présidents, ainsi que
les membres de ces mêmes Dicastères, cessent leurs fonctions. Exception est
faite pour le Camerlingue de la Sainte Église romaine et pour le grand
Pénitencier, qui continuent à s’occuper des affaires courantes, soumettant au
Collège des cardinaux ce qui aurait dû être référé au Souverain Pontife."
Dans ces conditions tout acte pris par la Congrégation
pour la Doctrine de la Foi entre le 29 février 2013 et au moins le 16 mars
2013, est entaché d'office d'une nullité absolue.
Le diocèse d'Annecy ne livre pas dans son communiqué
la date de l'acte émanant de la CDF, indiquant seulement qu'il s'agit du mois
de mars.
Si donc l'acte intervient dans la période de
suspension des fonctions de cette Congrégation, il n'échera pas même, de mener
plus outre l'analyse de cette décision.
Une parenthèse. Parmi les missions confiées à la CDF :
"7. Il lui revient de juger des
délits contre la foi, selon la procédure ordinaire." (3)
Indépendamment de la possible nullité préalablement
soulevée et qui sera de fait ou non, selon que l'Eglise voudra bien rapporter
l'indication de la date de l'acte critiqué, lecture faite de l'ensemble des
missions confiées à la CDF, hormis le cas des livres soumis à son sentiment,
tel que signalé au 5°, cette congrégation ne peut juger qu'après avoir entendu l'auteur du livre ou
appliqué la procédure ordinaire dès lors qu'il s'agit d'un délit contre la foi.
La question de la censure des livres étant à retirer
de cette réflexion sur la situation du Père Pascal VESIN, resterait le délit
contre la foi.
"Les
délits contre la foi, dont il s’agit à l’art. 1 sont l’hérésie, l’apostasie et
le schisme." (4)
A supposer que la CDF soit en activité donc au moins à
compter du 16 mars, pour prendre une décision, il conviendrait dans cette hypothèse, que le
litige soumis relève de l'hérésie, de l'apostasie ou su schisme et soit donc
qualifié à l'un de ces niveaux.
Nous laisserons au lecteur de cette réflexion, le soin
d'apprécier si le fait d'appartenir à la franc-maçonnerie constitue un cas
d'hérésie, de schisme ou d'apostasie, selon es définitions rapportées en note
(5), pour notre part cette appartenance maçonnique ne répond aux conditions
d'aucun de ces trois critères.
Par ailleurs, qu'en est-il de l'application de la
procédure ordinaire, accomplie ou non, car l'Eglise garde là encore le silence
en n'expliquant pas le déroulement des faits, au plan du Droit.
II Au fond
Comme rappelé dans ma Lettre ouverte à l'évêque d'Annecy (6), aucune disposition dans
nouveau Code de Droit Canonique dit de 1983 n'existe à l'encontre des
francs-maçons et/ou de la franc-maçonnerie.
L'idée pour tenter de suppléer à ce manque, de mettre
en avant une Déclaration du 26 novembre 1983 émanant de la CDF est un moyen
insuffisant, car ledit Code d'une part fut promulgué le 25 janvier 1983, et que
de seconde part aucun ajout ou modification ne fut dans ce corpus, mis en place
notamment quant à ce qui touche le reproche fait au Père Pascal VESIN.
En l'espèce, le Code est vide de toute disposition
quant au sujet examiné.
Une Déclaration n'est pas une Loi, ce n'est en Droit
que l'affirmation d'un fait, encore convient-il que ce fait soit qualifié dans
le cadre de la Loi qui attache à ce dernier une conséquence juridique.
Or, aucun article du Code n'attache de conséquence
juridique à l'appartenance à la
franc-maçonnerie.
A supposer que puisse être appliquée une disposition
canonique pour une faute qui resterait dans le cas présent à qualifier, ne
pourraient être appliquées que les dispositions de l'article 1349 qui énonce : "-
Si une peine est indéterminée et si la loi n'y pourvoit pas autrement, le juge
n'infligera pas de peines trop lourdes, en particulier des censures, à moins
que la gravité du cas ne le réclame absolument; même alors, il ne peut pas
infliger de peines perpétuelles." Encore faudrait-il démontrer qu'une
faute fut commise.
Alors que le Code de Droit canonique est vide de toute
disposition à l'encontre des francs-maçons, qu'il a été expliqué qu'une
Déclaration ne vaut pas Loi, que rien ne permet de déduire qu'une faute fut
commise, qu'à supposer que celle-ci puisse être qualifiée, il revenait - dans
le cas où la CDF n'aurait pas encouru de censure(s) au titre de la nullité de
son acte -, d'appliquer les dispositions de l'article 1349, qui empêchent
alors le régime des censures, ce que subit aujourd'hui le Père Pascal VESIN
puisqu'il est interdit d'accomplir son ministère et de surcroît de bénéficier
de la Sainte Communion.
III Par ces
motifs,
Il ne s'agit de donner une leçon à l'Eglise Romaine,
mais d'exprimer une grande surprise, qui se trouve partagée par les fidèles,
les chrétiens, les incroyants, quant à cette décision prise, peut-être bien
durant la vacance du Siège Apostolique, dans tous les cas en dehors de la
compétence rappelée de CDF à moins que ne puisse être démontré et dit
clairement que l'appartenance à la franc-maçonnerie relève d'un délit contre la
foi.
Vu les moyens soulevés,
C'est dans ces conditions qu'il est demandé à l'Eglise
de dire si la décision rendue :
- est soumise à une ou plusieurs nullités,
- si ce n'était le cas, si le fait d'appartenir à la
franc-maçonnerie constitue un délit contre la foi et qualifier la faute,
- si ce n'était pas non plus le cas, énoncer de quelle
faute il s'agit et son fondement,
Ainsi est-il demandé à la sagesse de l'Eglise d'annuler la décision prise à l'encontre du
Père Pascal VESIN,
Subsidiairement, et si par improbable, une faute pouvait
être retenue, faire application de
l'article 1349 du Code de Droit Canonique, au motif que touchant la
franc-maçonnerie aucune peine n'est déterminée et le Code n'y pourvoit pas.
En acceptant d'analyser les moyens soulevés et dire
haut et fort le bien fondé ou l'absence de fondement de la décision rendue
d'une part, ou d'autre part de requalifier les faits si cela devait
être, l'Eglise montrera non pas
seulement à son peuple mais aux hommes, qu'elle n'est pas en une telle matière
infaillible, et pouvant se tromper, humblement, elle accepte de revoir la
situation du Père Pascal VESIN.
Alors, ce sera justice, et bien des êtres seront
rassurés.
Jean-Pierre BONNEROT
25 août 2013
--------------- Note et
Sources
1 http://www.diocese-annecy.fr/rubriques/haut/actualites/communique/newsitem_view
2 VATICAN INFORMATION
SERVICE ANNO XXIII - N° 63b DATA 16-03-2013
3 LETTRE APOSTOLIQUE MOTU PROPRIO DE SA SAINTETÉ LE PAPE PAUL VI INTEGRÆ SERVANDÆ
3 LETTRE APOSTOLIQUE MOTU PROPRIO DE SA SAINTETÉ LE PAPE PAUL VI INTEGRÆ SERVANDÆ
4 Normes substantielles : http://www.vatican.va/resources/resources_norme_fr.html
5 Selon le Dictionnaire
de Droit Canonique du
Professeur R. NAZ, les définitions sont les suivantes :
- Apostasie : "abandon total de la foi chrétienne après la
réception du baptême."
Op. Cité, tome 1, Paris, LETOUZEY et ANE, 1935, col.
640.
- Hérésie : "est le fait pour celui qui a reçu le baptême
et prétend conserver le nom de chrétien, de nier ou de mettre en doute avec
opiniâtreté quelqu'une des vérités qu'"il faut croire comme étant de foi
divine et catholique", id, tome 5, 1953, col. 1105.
- Schisme : "le schismatique est celui qui après
avoir reçu le baptême, refuse soumission au Souverain Pontife ou ne veut plus
demeurer uni aux autres membres de l'Eglise." Id, tome 7, col. 886;
6 http://theologie-et-questions-disputeses.blogspot.fr/2013/08/lettre-ouverte-leveque-dannecy.html