dimanche 25 août 2013

De la suspicion de double nullité pour vice de forme et vice de fond de la décision prise à l'encontre du Père Pascal VESIN



Depuis maintenant plusieurs mois, le Père Pascal VESIN est soumis à l'interdiction d'administrer les sacrements de l'Eglise et de communier aux Saint Mystères, au motif de son appartenance à la Franc-Maçonnerie.

Il sera fait grief à l'Eglise Romaine d'avoir délibérément et contre les règles les plus élémentaires du Droit, prononcé une telle sentence.

Pour l'examen d'une demande tendant à une décision de justice, fut-elle d'ordre ecclésial, il revient, à qui est soumis le litige,  de s'assurer de  l     a capacité de  juger ce celui qui statuera, sous peine de voir la décision invalidée par le régime des nullités.

Avant d'en venir aux conditions et raisons dans les quelles la décision fut rendue, il n'est pas sans intérêt de rappeler déjà ce que précisait  l'ancien Code de Droit canonique dit de 1917 en son article 1892 :

" La sentence est affectée d'un vice de nullité irréparable lorsque:
n1) Elle a été portée par un juge incompétent d'une manière absolue, ou par un tribunal collégial comprenant un nombre irrégulier de juges au regard du
Can. 1576 p.1 ;
n2) Elle a été portée entre des parties dont l'une n'a pas qualité pour ester en justice
n3) Quelqu'un a agi au nom d'un tiers sans avoir un mandat régulier"

Le Code de Droit canonique dit de 1983 expose en son article 1620 :

"Une sentence est entachée d'un vice irrémédiable de nullité si: 1  elle a été rendue par un juge dont l'incompétence est absolue; 2  elle a été rendue par une personne dépourvue de  pouvoir de juger dans le tribunal qui a tranché la cause; 3  le juge a rendu sa sentence sous l'effet de la violence ou de la crainte grave; 4  le procès s'est fait sans la demande judiciaire dont il s'agit au  can. 1501, ou encore n'a pas eu lieu contre un quelconque défendeur; 5  elle a été rendue entre des parties dont l'une au moins n'avait pas qualité pour ester en justice; 6  quelqu'un a agi au nom d'une autre personne sans mandat légitime; 7  le droit de se défendre a été dénié à l'une ou l'autre des parties; 8  le litige n'a pas été au moins partiellement dirimé."

Avant d'aller plus outre, il sera fait observation que l'Eglise considère qu'une nullité absolue (irrémédiable)  ne peut être couverte ou régularisée dès lors que celui qui prenait la décision, se trouvait incompétent, dépourvu du pouvoir de juger à savoir rendre une sentence.

I Rappel des faits et procédure

Le Père Pascal VESIN fut démis de ses fonctions selon la décision prise par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (CDF) selon la requête exposée par l'évêque d'Annecy  sans que la date ne soit livrée, mais durant la vacance su Siège Apostolique. Le diocèse d'Annecy écrit : "En mars dernier, intervenait la décision de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi." (mars 3013) (1)

Le reproche fait à ce prêtre, trouve son origine dans la plainte courageusement anonyme formée, selon laquelle cet ecclésiastique se trouve être et prêtre et franc-maçon.

Revenons à la période à laquelle fut prise cette décision critiquée : la vacance du Siège Apostolique commença le 28 févier 2013 à 20 heures et ne s'achèvera qu'avec l'élection d'un nouveau Pape de Rome, élection  de François I, qui interviendra le 13 mars  2013. Le 16 mars, le pape François confirme provisoirement les chefs et les membres des Dicastères (2).

Il sera rappelé que selon les dispositions de la Constitution apostolique Universi Dominici gregis sur la vacance du Siège apostolique et l’élection du Pontife Romain, le chapitre III expose au § 14 : "Selon l’article 6 de la Constitution apostolique Pastor bonus13, à la mort du Pontife, tous les Chefs des Dicastères de la Curie romaine, c’est-à-dire le cardinal Secrétaire d’État, les cardinaux Préfets, les archevêques présidents, ainsi que les membres de ces mêmes Dicastères, cessent leurs fonctions. Exception est faite pour le Camerlingue de la Sainte Église romaine et pour le grand Pénitencier, qui continuent à s’occuper des affaires courantes, soumettant au Collège des cardinaux ce qui aurait dû être référé au Souverain Pontife."

Dans ces conditions tout acte pris par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi entre le 29 février 2013 et au moins le 16 mars 2013, est entaché d'office d'une nullité absolue.

Le diocèse d'Annecy ne livre pas dans son communiqué la date de l'acte émanant de la CDF, indiquant seulement qu'il s'agit du mois de mars.

Si donc l'acte intervient dans la période de suspension des fonctions de cette Congrégation, il n'échera pas même, de mener plus outre l'analyse de cette décision.

Une parenthèse. Parmi les missions confiées à la CDF : "7. Il lui revient de juger des délits contre la foi, selon la procédure ordinaire." (3)

Indépendamment de la possible nullité préalablement soulevée et qui sera de fait ou non, selon que l'Eglise voudra bien rapporter l'indication de la date de l'acte critiqué, lecture faite de l'ensemble des missions confiées à la CDF, hormis le cas des livres soumis à son sentiment, tel que signalé au 5°, cette congrégation ne peut juger  qu'après avoir entendu l'auteur du livre ou appliqué la procédure ordinaire dès lors qu'il s'agit d'un délit contre la foi.

La question de la censure des livres étant à retirer de cette réflexion sur la situation du Père Pascal VESIN, resterait le délit contre la foi.

"Les délits contre la foi, dont il s’agit à l’art. 1 sont l’hérésie, l’apostasie et le schisme."  (4)

A supposer que la CDF soit en activité donc au moins à compter du 16 mars, pour prendre une décision, il  conviendrait dans cette hypothèse, que le litige soumis relève de l'hérésie, de l'apostasie ou su schisme et soit donc qualifié à l'un de ces niveaux.

Nous laisserons au lecteur de cette réflexion, le soin d'apprécier si le fait d'appartenir à la franc-maçonnerie constitue un cas d'hérésie, de schisme ou d'apostasie, selon es définitions rapportées en note (5), pour notre part cette appartenance maçonnique ne répond aux conditions d'aucun de ces trois critères.

Par ailleurs, qu'en est-il de l'application de la procédure ordinaire, accomplie ou non, car l'Eglise garde là encore le silence en n'expliquant pas le déroulement des faits, au plan du Droit.


II Au fond

Comme rappelé dans ma Lettre ouverte à l'évêque d'Annecy (6), aucune disposition dans nouveau Code de Droit Canonique dit de 1983 n'existe à l'encontre des francs-maçons et/ou de la franc-maçonnerie.

L'idée pour tenter de suppléer à ce manque, de mettre en avant une  Déclaration du 26 novembre 1983 émanant de la CDF est un moyen insuffisant, car ledit Code d'une part fut promulgué le 25 janvier 1983, et que de seconde part aucun ajout ou modification ne fut dans ce corpus, mis en place notamment quant à ce qui touche le reproche fait au Père Pascal VESIN.

En l'espèce, le Code est vide de toute disposition quant au sujet examiné.

Une Déclaration n'est pas une Loi, ce n'est en Droit que l'affirmation d'un fait, encore convient-il que ce fait soit qualifié dans le cadre de la Loi qui attache à ce dernier une conséquence juridique.

Or, aucun article du Code n'attache de conséquence juridique à l'appartenance à la  franc-maçonnerie.

A supposer que puisse être appliquée une disposition canonique pour une faute qui resterait dans le cas présent à qualifier, ne pourraient être appliquées que les dispositions de l'article 1349 qui énonce : "- Si une peine est indéterminée et si la loi n'y pourvoit pas autrement, le juge n'infligera pas de peines trop lourdes, en particulier des censures, à moins que la gravité du cas ne le réclame absolument; même alors, il ne peut pas infliger de peines perpétuelles." Encore faudrait-il démontrer qu'une faute fut commise.

Alors que le Code de Droit canonique est vide de toute disposition à l'encontre des francs-maçons, qu'il a été expliqué qu'une Déclaration ne vaut pas Loi, que rien ne permet de déduire qu'une faute fut commise, qu'à supposer que celle-ci puisse être qualifiée, il revenait  - dans le cas où la CDF n'aurait pas encouru de censure(s) au titre de la nullité de son acte -, d'appliquer les dispositions de l'article 1349, qui empêchent alors le régime des censures, ce que subit aujourd'hui le Père Pascal VESIN puisqu'il est interdit d'accomplir son ministère et de surcroît de bénéficier de la Sainte Communion.

III Par ces motifs,

Il ne s'agit de donner une leçon à l'Eglise Romaine, mais d'exprimer une grande surprise, qui se trouve partagée par les fidèles, les chrétiens, les incroyants, quant à cette décision prise, peut-être bien durant la vacance du Siège Apostolique, dans tous les cas en dehors de la compétence rappelée de CDF à moins que ne puisse être démontré et dit clairement que l'appartenance à la franc-maçonnerie relève d'un délit contre la foi.

Vu les moyens soulevés,

C'est dans ces conditions qu'il est demandé à l'Eglise de dire si la décision rendue :
- est soumise à une ou plusieurs nullités,
- si ce n'était le cas, si le fait d'appartenir à la franc-maçonnerie constitue un délit contre la foi et qualifier la faute,
- si ce n'était pas non plus le cas, énoncer de quelle faute il s'agit et son fondement,

Ainsi est-il demandé à la sagesse de l'Eglise  d'annuler la décision prise à l'encontre du Père Pascal VESIN,

Subsidiairement, et si par improbable, une faute pouvait être retenue, faire application  de l'article 1349 du Code de Droit Canonique, au motif que touchant la franc-maçonnerie aucune peine n'est déterminée et le Code n'y pourvoit pas.

En acceptant d'analyser les moyens soulevés et dire haut et fort le bien fondé ou l'absence de fondement de la décision rendue d'une part,  ou d'autre part de  requalifier les faits si cela devait être,  l'Eglise montrera non pas seulement à son peuple mais aux hommes, qu'elle n'est pas en une telle matière infaillible, et pouvant se tromper, humblement, elle accepte de revoir la situation du Père Pascal VESIN.

Alors, ce sera justice, et bien des êtres seront rassurés.

Jean-Pierre BONNEROT
25 août 2013


--------------- Note et Sources
1 http://www.diocese-annecy.fr/rubriques/haut/actualites/communique/newsitem_view

2 VATICAN INFORMATION SERVICE ANNO XXIII - N° 63b DATA 16-03-2013

3 LETTRE APOSTOLIQUE MOTU PROPRIO DE SA SAINTETÉ LE PAPE PAUL VI INTEGRÆ SERVANDÆ
4 Normes substantielles : http://www.vatican.va/resources/resources_norme_fr.html

5 Selon le Dictionnaire de Droit Canonique du Professeur R. NAZ, les définitions sont les suivantes :

- Apostasie : "abandon total de la foi chrétienne après la réception du baptême."
Op. Cité,  tome 1, Paris, LETOUZEY et ANE, 1935, col. 640.

- Hérésie : "est le fait pour celui qui a reçu le baptême et prétend conserver le nom de chrétien, de nier ou de mettre en doute avec opiniâtreté quelqu'une des vérités qu'"il faut croire comme étant de foi divine et catholique", id, tome 5, 1953, col. 1105.

- Schisme : "le schismatique est celui qui après avoir reçu le baptême, refuse soumission au Souverain Pontife ou ne veut plus demeurer uni aux autres membres de l'Eglise."  Id, tome 7, col. 886;

6 http://theologie-et-questions-disputeses.blogspot.fr/2013/08/lettre-ouverte-leveque-dannecy.html





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire